Ecole : Libre d’interdire ?

Voici le point où j’en suis venu de ma réflexion sur la question du prosélytisme religieux à l’école, question redevenue d’actualité en cet automne 2022 :

Nos jeunes provocateurs ados en quête identitaire ou existentielle (qu’ils soient pions manipulés par des islamistes ou juste ados en quête de provocation ou d’intégration communautaire ou ‘tribale’ voire d’existentialisme numérique) permettent de pointer d’éventuelles limites ou failles de la loi de 2004 : comment décider si un affichage vestimentaire relève de la futilité d’une mode ‘djeuns‘, du sérieux d’un prosélytisme religieux ou idéologique, d’une contestation séparatiste de gens qui au nom de leurs origines familiales ‘exogènes’ tiendraient, tout en fréquentant une école d’ici garante de leurs droits, à afficher leur droit d’être des ‘pas d’ici’, etc.

Peut-on laisser enseignants ou directeurs d’établissements scolaires se perdre dans des casuistiques (détermination des éventuelles intentions – ce qui peut exposer en outre au procès d’intentions) les exposant à des dilemmes qui les condamnent soit au ridicule (faire raccourcir une robe, une barbe ?) soit à l’autoritarisme “facho” ou “islamophobe” ?

La loi de 2004 (dont j’étais alors un partisan) me semble maintenant devoir affronter de nouvelles transgressions : aussi longtemps que seul le voile (islamique) était le drapeau de l’islamisme, il était facile d’en dénoncer à la fois le prosélytisme religieux et l’inégalité sexiste (quand seules des filles étaient les vecteurs et les victimes de la conquête islamiste). On en voit les limites maintenant que toutes sortes d’accessoires vestimentaires (chemises, robes, pantalons, etc.) voire pileux demain (barbe ?) permettent aux islamistes (et à leurs affidés de tout genre) d’afficher leur prosélytisme, leurs préférences identitaires, communautaires, cultuelles ou idéologiques.

L’imposition d’un ‘uniforme’ serait-elle une piste ? Genre tablier unisexe en coton biologique ? Suffisamment long pour couvrir les robes les plus longues ? Et nos élèves, entrant à l’école, auraient le sentiment d’entrer au couvent ou en colonie pénitentiaire ? Plus de crop-top ? Plus de string rose débordant d’un pantalon taille basse ? Plus de jean d’une marque prestigieuse aux jambes déchirées pour signifier la misère du monde ?

N’est-ce pas plutôt le libéralisme vestimentaire le plus total, voire le plus anarchique qui pourrait nous ouvrir des perspectives, à la fois pittoresques ou libertaires des plus créatrices ? On sait qu’une mode, c’est ce qui se démode. Souvenons-nous des piercings et autres gothismes de naguère (auxquels on aurait pu trouver à redire, ne serait-ce que pour des raisons sanitaires). Imaginons les futurs tatouages par lesquels chacun affichera ce qu’il penserait être son moi profond, voire ses convictions religieuses ou idéologiques, etc. etc.

Sauf que, en l’occurrence, ce qui nous interpelle ici n’est pas une question de mode juvénile diversement manipulée par des médias ou autres influenceurs en quête d’un marché à conquérir mais d’un prosélytisme idéologique en quête de pouvoir et d’esprits à coloniser. Ce prosélytisme qui cherche à manipuler ou à enrôler les plus faibles, les plus influençables devrait nous être particulièrement odieux et donc à combattre.

Comment le combattre ? Du moins de quel côté organiser la meilleure résistance (à défaut de la meilleure attaque, puisque nous ne voulons pas être des va-t-en-guerre) ? La meilleure résistance, on le sait en physique, c’est celle qui ne laisse pas du tout passer le courant. En l’occurrence, ce serait l’interdiction totale de tout ce qui, de près ou de loin, du haut jusqu’en bas, à tort ou à raison, pourrait laisser penser à quiconque qu’on serait devant du prosélytisme vestimentaire religieux ou commercial (car il n’y a pas de raison qu’on ferme l’école à la religion et qu’on la laisse ouverte à l’idéologie prônant un consumérisme commercial écologiquement fort nocif).

Et donc, en milieu scolaire ou éducatif (de la maternelle jusqu’au lycée, des salles de classe aux cours de récréations, des gymnases jusqu’au sorties pédagogiques, bref en tous espaces ou situations où sont censés être éduqués des mineurs) rien de ce qui pourrait être interprété comme un vecteur de propagande idéologique, religieuse ou commerciale ne serait toléré.

Sauf que nous devrions bien nous douter que là où il y a mur, il y aura murmure, que là où l’on voudra endiguer, des infiltrations seront tentées et des tunnels creusés, et qu’à l’interdit le plus strict (dont il sera facile de dénoncer le ridicule ou le ‘fachisme’) la créativité libératrice la plus fantaisiste saura opposer ses provocations et transgressions.

Le libéralisme idéologique, les “Lumières” au nom desquelles nous avons su mettre à jour sinon inventer (au sens étymologique) des ‘Droits humains’ universels pourrait-il nous permettre, aujourd’hui, de poser des interdits à l’expression de nos enfants, qui ne seraient donc pas des ‘humains’ dignes du respect de leurs droits (comme on ne manquera pas de nous l’objecter) ?

Oui. Ces interdits sont à oser, à poser, comme on pose des jalons, comme on propose un cadre. Justement parce que nous savons que nos enfants sont des humains en devenir et qu’au nom même de cet avenir, de ces droits universels dont ils doivent pouvoir jouir à vie, nous devons les protéger de ceux qui, au nom de droits particuliers (familiaux, communautaires ou coutumiers), les engageraient dans des parcours voire des ornières où leur développement ne pourrait qu’être entravé. Ne confondons pas le chemin de la liberté avec ses ornières.

Reste néanmoins fort à craindre que si l’on voulait interdire tout ce qui, de près ou de loin, pourrait valoir affichage de convictions religieuses ou d’idéologies politiques quelconques, voire d’adhésion à des clans, tribus (via des exhibitions liées à des marques commerciales) ou gangs (via des tatouages), nous n’arriverions jamais à envisager tout ce qui pourrait être inventé pour provoquer le système, le ridiculiser ou le faire passer pour ‘facho’, totalitaire ou diversophobe.

Sans doute que seule la plus créatrice ou libertaire des anarchies vestimentaires pourrait nous sauver de ces dilemmes. Les Lumières ne peuvent briller que là où nulle pensée, si obscure nous semblera-t-elle, n’est mise sous le boisseau.

A condition qu’on permette à l’enseignant de soulever ce boisseau pour permettre à l’esprit qu’on y enfermerait de se libérer.

Put’in out !

Sur la guerre déclenchée contre l’Ukraine (et au mépris du droit international) par Poutine :

Je suis à la fois complètement  consterné, abattu et presque physiquement déprimé par l’incroyable attentat que l’autocrate national-populiste russe vient de commettre contre un pays voisin et historiquement frère, au mépris de toutes ses promesses, de toutes les conventions internationales, au mépris de la paix en Europe.

L’Ukraine risque d’être déchirée et ruinée, avant d’être sans doute politiquement voire moralement livrée aux mafias canailles des oligarques et autres affidés ou marionnettes du dictateur russe.

Néanmoins, au moment où cette énième saloperie vient d’être décidée et assumée en répandant autour d’elle morts, malheurs et futur marasme économique, je sens poindre au fond de moi, m’en étonnant moi-même, une onde d’espoir dont je veux ici faire part. Peut-être juste pour ne pas broyer du noir tout seul, comme nous n’en avons sans doute que trop souvent l’habitude dans un pays (voire une UE) que nous sentons souvent se dissiper dans son anomie.

Il n’est pas impossible que le sang versé par Poutine ne finisse par retomber sur lui. Napoléon et Hitler ont eux aussi fini vaincus d’avoir trop souvent gagné.

Même les hordes primitives (dont le conservatisme de l’instinct grégaire n’aime guère l’hubris devenue suicidaire) se retournent parfois contre le mâle alpha dont elles auront pourtant longtemps subi la domination. On sait le grand nombre d’attentats tentés contre Hitler une fois que son hubris – ivresse eut fait trembler dans sa main la coupe de ses victoires. Il n’est pas impensable que même un peuple soumis et résigné ne trouve un jour impossible d’avaler la goutte d’amertume ou d’humiliation de trop après en avoir pourtant avalé des louches.

On sait que certaines parties d’échecs qui pouvaient mener au nul ou au pat ont été perdues par une attaque conçue comme décisive mais, de fait, inconsidérée. 

Il n’est pas impossible que l’outrance visible par le monde entier du coup de force de Poutine lui interdise à tout jamais (lui et son régime) de pouvoir passer pour un ‘responsable’ politique, au yeux tant de son propre peuple que du monde entier, en tout cas de l’Europe et des nombreux pays encore vaguement démocratiques et soucieux d’un minimum de respect des droits élémentaires des hommes et des peuples.

Il n’y a qu’à voir à quelle vitesse nos candidats poutinophiles, soit par europhobie soit par anti-américanisme soit par admiration devant l’autocrate qu’ils rêveraient d’être ont vite recraché les mots dont ils se gargarisaient hier encore…

Bref, c’est au coeur de la nuit qu’il arrive parfois qu’on se sente tellement frileux de lumière qu’on s’enflammerait soi-même pour en avoir. 

De profundis.

Une tribune, mon tribut

Je souhaite mettre en partage ma lecture critique d’une tribune parue sur le site Figaro vox, signée, entre autres, par certaines personnes pour lesquelles j’ai (avais ?) suffisamment d’estime pour avoir pris le temps de la lire attentivement, avant de la relire pour en pointer faiblesses ou manipulations.

https://www.lefigaro.fr/vox/monde/ceux-qui-menacent-israel-nous-menacent-aussi-20210518

Dommage que cette tribune ne précise pas les circonstances au vu desquelles le Hamas aura justifié cette nouvelle attaque, qui indépendamment du nombre de roquettes tirées, n’est pas sans précédent. Pluie de roquettes qui n’est pas destinée à « détruire l’Etat hébreu », même si elle constitue sans doute un crime de guerre (puisque tirant au hasard vers des populations civiles).

On a le droit de prendre position en faveur du peuple palestinien dont le territoire internationalement reconnu par les résolutions de l’ONU en 1948-49 a ensuite été occupé après la guerre de 1967 et, depuis, mité par diverses colonies israéliennes.

Que les Palestiniens n’aient pas reconnu la légitimité internationale de l’Etat d’Israël proclamée en 1948 ne permet pas légalement à Israël de conquérir ensuite, par la force armée, des terres qui ne lui ont pas été accordées par la reconnaissance internationale.

Depuis 1967, Israël s’est ainsi mis en porte-à-faux par rapport aux déclarations internationales le reconnaissant dans ses frontières de 1949. Et quoi qu’il faille et qu’on doive lui reconnaître la même légitimité qu’à d’autres Etats créés eux aussi à l’issue de guerres ou de décolonisations au cours du XXe siècle, on peut le traiter, pour les terres occupées depuis 1967, de pays colonisateur.

En semant une fois de plus et de façon disproportionnée tant de morts et de victimes en territoire palestinien, Israël ne fait qu’alimenter la haine que lui portent beaucoup de populations ou de mouvements politiques s’identifiant à ces victimes. Face à ces attaques, Israël aurait pu tenter, au moins durant un certain temps, des alternatives moins agressives (moins meurtrières de population civile) et plus défensives, par exemple en ayant davantage recours à son système de “dôme de fer” anti-missiles. Devenu ainsi un Etat dont la population civile était la victime d’attaques “terroristes”, Israël aurait pu gagner en sa faveur l’opinion publique internationale (faisant ainsi perdre à Gaza ce statut de victime qui entraîne en sa faveur tant de manifestations de soutien).

Le Hamas n’est qu’un des malheurs qui frappe le peuple palestinien. Il est incontestable que l’occupation de territoires palestiniens après la guerre de 1967, puis l’installation de nombreux foyers de colonisation sur ces terres n’est pas négligeable dans le malheur du peuple palestinien.

Les Européens n’ont pas eu à attendre que se tende une énième fois la situation en Palestine pour avoir été victimes de l’idéologie islamiste. On ne peut pas demander aux Européens de devoir se faire les complices de diverses formes de néo-colonisation d’Israël pour avoir le droit de lutter de façon déterminée contre l’islamisme. Confondre la lutte contre l’islamisme qui nous frappe sur notre sol et le soutien à la politique expansionniste néosioniste d’Israël serait au contraire une manière d’affaiblir la légitimité de notre lutte contre l’islamisme.

Si, « pour exister et persévérer dans son être », Israël doit imposer divers blocus à des populations civiles (à Gaza) et rendre difficile sinon impossible la vie quotidienne de populations vivant sur des territoires indûment occupés (ceux conquis après 1967), cela ne pourra se faire qu’au risque de grandes souffrances voire de menaces existentielles (on ne sait jamais de quelles armes abominables pourraient se doter des ennemis irréductibles qu’on aurait réduits au plus total désespoir)

Affronter un ennemi, y accumuler les victimes parmi les populations civiles, sans pouvoir l’abattre définitivement, ou en s’interdisant de le faire pour des raisons politiques, militaires, humanitaires ou diplomatiques, tout en ne se donnant aucune perspective de paix négociable n’est qu’une manière d’aggraver la situation en multipliant les facteurs de haines et de violences.

Le peuple israélien occupant les terres qui lui ont été internationalement reconnues depuis 1948-49 (par des résolutions devant permettre la création de deux Etats voisins, l’un israélien, l’autre palestinien) ne doit pas être confondu avec les colons, militants ou milices diverses qui pour des raisons économiques, politiques ou religieuses (fanatisme eschatologique) profitent du rapport militaire de forces en leur faveur pour occuper des terres conquises par la force et qu’ils n’ont aucune légalité internationale à occuper.

PS 1 : article 17 de la Charte de l’OLP (1964) considérant comme nulles et non avenues les déclarations de l’ONU reconnaissant l’existence de l’Etat d’Israël dans les frontières prévoyant le partage de la Palestine en deux Etats, l’un juif, l’autre palestinien :  » Le partage de la Palestine en 1947 et la création d’Israël sont des décisions illégales et artificielles quel que soit le temps écoulé, parce qu’elles ont été contraires à la volonté du peuple de Palestine et à son droit naturel sur sa patrie. Elles ont été prises en violation des principes fondamentaux contenus dans la charte des Nations unies parmi lesquels figure au premier rang le droit à l’autodétermination. »

PS 2 :  Le Hamas est sur la liste officielle des organisations terroristes de l’Union européenne, du Canada et des États-Unis. Il est classé « terroriste » par Israël, l’Egypte et le Japon, et est banni en Jordanie. Pour la Grande-Bretagne et l’Australie, seule la branche armée du Hamas est classée comme terroriste. Le 29 janvier 2015, la justice égyptienne a classé la branche militaire du Hamas comme organisation terroriste, l’accusant de soutenir l’insurrection djihadiste dans le Sinaï.  [Wikipédia] 

La plaidoirie de maître Malka au « procès Charlie » (décembre 2020)

Je me permets de reproduire ici un article paru dans le Monde.fr, mais réservé aux seuls abonnés.
Comme j’estime qu’il s’agit d’une réflexion fondamentale et d’un document historique,
je trouve normal qu’il soit plus largement partagé :


« “Charlie” est devenu une idée. On ne la tuera plus »

Par Henri Seckel et Pascale Robert-Diard    Publié le 5 12 2020 dans le Monde;fr

Richard Malka, avocat de « Charlie Hebdo », a clos les plaidoiries de parties civiles par un puissant hommage à la liberté d’expression, dont « Le Monde » publie de larges extraits.

Lundi 2 novembre, Richard Malka devait se lever pour plaider au nom de Charlie Hebdo, le journal qu’il défend depuis sa création, en 1992. Les parties civiles avaient déterminé entre elles un ordre simple pour leur prise de parole. Elle suivrait la tragique chronologie de ces journées de janvier 2015 qui ont fait dix-sept victimes et plusieurs blessés graves. L’attentat commis rue Nicolas-Appert, dans le 11e arrondissement de Paris, au siège de Charlie Hebdo, la fusillade du boulevard Richard-Lenoir, et la tentative d’assassinat à Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine), le 7. La fusillade à Montrouge (Hauts-de-Seine) le 8. La prise d’otages dans l’imprimerie de Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne), suivie quelques heures plus tard, de celle, meurtrière, à l’Hyper Cacher de la Porte de Vincennes (Paris 20e), le 9.

Le fracas des trois premières semaines du procès consacrées aux dépositions des survivants et des témoins, auquel avaient succédé les explications tour à tour laborieuses, agacées, éruptives, souvent décevantes, des onze accusés interrogés, étaient alors dans la mémoire vive. Chacun de ces avocats allait enfin pouvoir porter par sa parole, le chagrin, les questions, la colère et la souffrance qui leur avaient été confiés. Mais juste au moment de son envol, cette parole a été suspendue. L’état de santé de l’un des accusés, Ali Riza Polat, a interrompu le procès, d’abord deux jours, puis une semaine, puis deux, puis trois.

Chaque fois, les avocats se tenaient prêts. Chaque nouvelle annonce de suspension les laissait plus désemparés. Comment allaient-ils faire pour retrouver les mots et la fougue pour les prononcer ? Quel sens ces mots auraient-ils encore après une si longue interruption ?

Quand l’audience a enfin repris, mercredi 2 décembre, ils n’étaient pas les seuls à douter. L’atmosphère si singulière de la cour d’assises s’était dissipée. L’attention aussi. Le public, confiné, avait déserté. Ce partenaire essentiel à l’orateur – « celui qui écoute participe à la parole », disait l’avocat Thierry Lévy – manquait.

Et pourtant les voix se sont élevées. Pour celles et ceux tués parce que juifs, parce que policiers, parce que dessinateurs. Pour les parents, les enfants, les compagnes, les compagnons, les maris, les épouses des disparus. Pour les blessés avec ou sans blessures apparentes. Pour tous ceux que ces avocats soutiennent depuis des années et qu’ils n’avaient pas le droit de décevoir et de lâcher.

Le nécessaire combat pour la liberté d’expression

L’ordre des plaidoiries des avocats a été bousculé et ceux de Charlie ont parlé en dernier. L’attentat au hachoir commis le 25 septembre devant les anciens locaux du journal par un terroriste qui ignorait que Charlie Hebdo avait déménagé, puis trois semaines plus tard, le 16 octobre, la décapitation du professeur d’histoire Samuel Paty à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), après un cours où il avait montré une caricature de Mahomet, ont remis au premier plan le nécessaire combat pour la liberté d’expression. A celle qu’il surnomme sa « malheureuse cliente », Richard Malka a offert, vendredi 4 décembre, le plus beau des hommages.

VERBATIM :

« Le temps qui passe, les contretemps, les renvois d’audience, les déficiences et les indécences de certains, tout cela ne peut rien changer à la profondeur de notre chagrin. Celui d’être privé de l’intelligence, du talent et de la bonté de ceux qui ne sont plus. Alors on cherche un sens. C’est le seul moyen de le supporter. Un sens à ce qui est arrivé. Un sens à ce procès.

Il a été épique, tragique, tourmenté. Il a déclenché la fureur du monde. Il a été ponctué d’attentats. Il nous a livré la parole bouleversante des victimes et nous a perdus dans les tentatives d’explication des accusés. Son sens c’est évidemment, et d’abord, de juger ces accusés. C’est de démontrer que le droit prime la force. Tout cela est déjà énorme, et dans n’importe quel procès ce serait suffisant. Mais pas là. Pas au regard des crimes commis. Les attentats de l’Hyper Cacher et de Charlie ne sont pas que des crimes. Ils ont une portée politique, philosophique, métaphysique. Ils convergent vers la même idée, ils ont le même but. Quand Coulibaly tue des juifs, il ne tue pas que des juifs, il tue l’autre. Charlie Hebdo aussi, c’est l’autre. Le sens de ces crimes, c’est l’annihilation de l’autre, de la différence. Si l’on ne répond pas à cela, on se sera arrêté en chemin.

Cette cour n’a pas pour objet de protéger la liberté et l’altérité. Mais de la même façon que vous avez organisé ce procès en deux temps, celui des victimes et celui des accusés, il faut accepter qu’il y ait deux procès en un. Celui des accusés et celui des idées que l’on a voulu assassiner. Ces fameuses valeurs républicaines ébranlées. Ces crimes ne sont pas des crimes comme les autres et ce procès ne peut pas être un procès comme un autre. Il doit tenir compte de sa dimension symbolique. Et mon rôle, comme avocat de la personne morale Charlie Hebdo sera de m’attacher à ce second volet.

Je ne plaide pas pour l’histoire. Je n’en ai rien à faire, de l’histoire. Je veux plaider pour aujourd’hui, pas pour demain. Pour les hommes d’ici et maintenant, pas pour les historiens du futur. Le futur, c’est comme le ciel, c’est virtuel. C’est à nous, et à nous seuls, qu’il revient de s’engager, de réfléchir, et parfois de prendre des risques pour rester libres d’être ce que nous voulons. C’est à nous, et à personne d’autre, de trouver les mots, de les prononcer pour recouvrir le son des couteaux sous nos gorges. A nous de rire, de dessiner, de jouir de nos libertés, face à des fanatiques qui voudront nous imposer leur monde de névroses et de frustrations. C’est à nous de nous battre pour rester libres. C’est ça qui se joue aujourd’hui.

Rester libre, cela implique de pouvoir dire ce que l’on veut des croyances sans être menacé de mort, abattu par des kalachnikovs ou décapité. Or, ce n’est plus le cas aujourd’hui dans notre pays. Pendant ce procès, un enseignant a été coupé en deux. Pendant ce procès, on a tué dans une basilique. On a atrocement blessé rue Nicolas-Appert. On a menacé dans plusieurs communiqués, dont un d’Al-Qaida.

Le message de ces terroristes est clair. Ils nous disent : vos mots, vos indignations ne servent à rien. On continuera à vous tuer. Vos juges, vos procès, sont indifférents. Vos lois sont des blagues, nous ne répondrons qu’à celles du Ciel. Ils nous disent de renoncer à la liberté parce qu’un couteau et un hachoir seront plus forts que 67 millions de Français, une armée et une police. C’est l’arme de la peur pour nous faire abandonner un mode de vie construit au fil des siècles. Et évidemment, ça ne s’arrêtera pas aux caricatures, ni même à la liberté d’expression. Ils détestent nos libertés. Ils ne s’arrêteront pas, parce que nous sommes un des rares peuples au monde à être porteur d’un universalisme qui s’oppose au leur.

Comment en est-on arrivé là ? Qu’est-ce que cette nouvelle guerre qui oppose des dessinateurs avec leurs crayons, des enseignants avec leur tableau, à des fanatiques armés de kalachnikovs ou d’ustensiles de boucherie ? Par quel enchevêtrement d’idées, de discours et d’errements en est-on arrivé à ce que, pour la première fois dans le monde occidental depuis la fin de la guerre, un journal soit décimé, avant de devoir se retrancher dans un bunker à l’adresse secrète ? Qui a nourri le crocodile en espérant être le dernier à être mangé ? Parce que c’est toujours la même chose : quand on est confronté à la peur, certains choisissent de pactiser.

L’histoire que je vais vous raconter est notre histoire à tous. C’est en partie, Messieurs, celle qui vous a amenés dans ces box, alors j’espère qu’elle va vous intéresser.

Le compte à rebours s’est déclenché à Amsterdam le 2 novembre 2004. Theo Van Gogh était un journaliste et un réalisateur pas sympathique. En 2004, il réalise Submission pour dénoncer la soumission des femmes dans l’islam. Le 2 novembre 2004, il est abattu dans une rue d’Amsterdam de huit balles dans le corps par un jeune islamiste de tendance takfiriste [une sous-branche du salafisme]. Ensuite il est égorgé, et on lui plante deux poignards dans le torse. Sur l’un de ces poignards, un petit mot de menaces de mort contre les juifs. C’est la matrice de 2015 et de ses deux obsessions : la liberté d’expression et l’antisémitisme.

A la suite de cet assassinat, un autre écrivain, danois cette fois, Kare Bluitgen, veut écrire un livre sur la vie de Mahomet dans un souci pédagogique à destination de la jeunesse. Il cherche un illustrateur. Tout le monde refuse. La peur a déjà gagné. Alors, le 17 septembre 2005, il écrit dans un journal pour dénoncer l’autocensure dès qu’il s’agit de l’islam. Flemming Rose, rédacteur en chef des pages culture du Jyllands-Posten, un journal de centre droit qui serait l’équivalent chez nous du Figaro, va demander au syndicat des caricaturistes danois comment il représente Mahomet. Le 30 septembre 2005, ces caricatures sont publiées. Pendant deux mois, il ne se passe pas grand-chose.

Cette affaire ne va prendre sa véritable ampleur qu’à raison d’une escroquerie à la religion. Elle a été commise par des imams danois de la mouvance des Frères musulmans, essentiellement des salafistes. En décembre 2005, ces imams partent faire le tour des capitales arabes. pour mobiliser les Etats musulmans contre ces méchants danois islamophobes. Et pour le prouver, ils constituent un dossier, comprenant les caricatures. Ce dossier, on l’a récupéré.

Le problème, c’est que dans ce dossier, ils ont ajouté trois dessins qui n’y figuraient pas [Me Malka les montre]. Deux d’entre eux viennent d’un site de fous furieux, des suprémacistes blancs américains. Un autre vient de France, il n’a rien à voir avec l’islam, c’est un dessin sur la Fête du cochon à Tulle en Corrèze. Et les imams disent : « Voilà comment on représente l’islam en Occident. » Et alors là évidemment, sur le fondement de cette supercherie, de cette mystification, le monde s’embrase. Et il y a des manifestations, des morts, des drapeaux brûlés. Ils ont allumé le feu et ils nous traitent d’incendiaires ? Alors oui, c’est dur d’être aimé par des cons d’intégristes mais c’est encore plus triste d’être instrumentalisé par des escrocs !

Puis vient le temps de la récupération politique. En janvier 2006, la très officielle Organisation de la conférence islamique, qui regroupe 57 pays, va saisir l’ONU et lui demander d’obliger tous les pays du monde à interdire la critique des religions. Voilà comment une escroquerie va tenter d’obtenir une modification du droit mondial sur la liberté d’expression !

Et c’est là que l’on va commencer à nourrir le crocodile. Le 3 février 2006, le cheikh Al-Qaradawi, guide spirituel des Frères musulmans, déclare un « Jour de la colère ». Le même jour, Jacques Chirac, Bill Clinton et le secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, déclarent que « les journaux ayant contribué à diffuser les caricatures ont fait un usage abusif de la liberté de parole » et font appel à plus de respect envers les sentiments religieux.

On en est arrivé là : le monde a cédé devant l’obscurantisme, la vérité a été recouverte par le mensonge. Et ceux qui détestent nos libertés ont senti le sang de nos démocraties et ça leur a donné de l’appétit. L’opération d’Al-Qaradawi a parfaitement réussi.

Cette histoire des caricatures, il faut la connaître. Il faut la répéter, il faut l’enseigner. [Le premier ministre canadien] Justin Trudeau connaît-il cette histoire, lui qui nous donne des leçons d’accommodements raisonnables pendant ce procès ? Le président [turc, Recep Tayyip] Erdogan, qui nous fait des leçons d’antiracisme, connaît-il cette histoire ? Savent-ils que tout cela n’a pas été commis par nous ?

Mais la machine va se gripper. La machination politique ne va pas aller jusqu’au bout. France Soir va publier ces caricatures en France, son directeur [Jacques Lefranc] sera immédiatement limogé et Charlie Hebdo va reprendre ces caricatures et les publier par solidarité. En 2007, nous sommes poursuivis par l’UOIF [Union des organisations islamiques de France] et la mosquée de Paris, nous gagnons le procès. On croyait qu’on avait gagné. En fait, on n’avait rien gagné du tout.

Il faut encore savoir quelque chose. Le monde entier pense que le procès des caricatures a eu lieu en France. Le premier procès, il a eu lieu au Danemark, avec le même résultat. Mais il n’a intéressé personne. Et pourquoi ? Parce que la France a une histoire particulière. Parce que c’est le premier pays au monde à avoir banni le blasphème du code pénal. C’était en 1791. La même année que le décret sur l’égalité des juifs. Je ne sais pas pourquoi, mais ces deux questions sont toujours liées, pour le pire et pour le meilleur.

Alors l’histoire du blasphème en France, je vais vous la raconter.

En 1789, la liberté d’expression est proclamée comme un des droits les plus précieux de l’homme. Deux ans plus tard, on sort le blasphème du code pénal. En 1881, on vote la grande loi sur la liberté de la presse. Les débats font rage à l’Assemblée et c’est frappant de constater à quel point ils se focalisent sur ceux d’aujourd’hui : le dessin et la religion. C’est comme si Charlie Hebdo existait déjà ! « Dieu se défendra bien lui-même, il n’a pas besoin pour cela de la Chambre des députés ! », répond Clemenceau à l’évêque d’Angers qui invoque la blessure des catholiques outragés.

Alors vous voyez, on n’a pas le choix. Renoncer à la libre critique des religions, renoncer aux caricatures de Mahomet, ce serait renoncer à notre histoire, à l’Encyclopédie, aux grandes lois de la République. Renoncer à enseigner que l’homme descend du singe et pas d’un songe. Renoncer à l’égalité pour les femmes, qui ne sont pas la moitié des hommes, à l’égalité pour les homosexuels, alors que, bizarrement, dans 72 pays au monde, les mêmes ou à peu près que ceux qui ont encore une législation contre le blasphème, l’homosexualité est encore une abomination.

Ce serait renoncer à l’indomptable liberté humaine pour vivre enchaîné. Ce serait renoncer à ce droit si merveilleux d’emmerder Dieu, monsieur le président. Charlie Hebdo ne peut pas y renoncer, et nous n’y renoncerons jamais, jamais, jamais. C’est ça, Charlie Hebdo. C’est notre droit, il est reconnu par les tribunaux. Et au-delà de nos tribunaux nationaux, par la CEDH [Cour européenne des droits de l’homme], qui lie des centaines de millions de personnes et ne dit pas autre chose.

Mais alors comment on fait pour sortir l’islam de cela ? Il faudrait le sortir du pacte républicain ? Il faudrait dire, non, il n’y a qu’une religion qui devrait avoir un traitement de faveur, qu’on ne pourrait pas caricaturer, et ce serait l’islam ? Ce n’est pas possible. Le combat de Charlie Hebdo, c’est aussi un combat pour la banalisation de l’islam. C’est un combat pour qu’on regarde cette religion comme une autre. Qu’on la traite comme une autre. En faire une exception, c’est évidemment le pire service qu’on pourrait lui rendre. On ne peut pas sortir une religion de l’égalité. Les religions doivent faire l’objet de la satire, et pour reprendre les mots de Salman Rushdie, de « notre manque de respect intrépide ».

On nous reproche des caricatures des religions. Mais en réalité, nous n’en avons jamais fait. Ce n’est pas vrai. Toutes les caricatures dont nous avons parlé ici ne sont pas des caricatures de la religion, ce sont des caricatures du fanatisme religieux, de l’irruption de la religion dans le monde politique.

Alors j’en viens à l’histoire de Charlie, la personne morale que je représente. En 1960, nous sommes dans la France corsetée du général de Gaulle, Cavanna rencontre Choron, ils décident de créer un journal transgressif pour bousculer les mœurs, un journal essentiellement fait de dessins, c’est Hara-Kiri. Le slogan de ce journal au départ, c’est : « Si tu ne peux pas l’acheter, vole-le. ». Cabu va les rejoindre, puis Gébé, Topor, Wolinski, Reiser. En 1970, c’est l’interdiction.

Le 1er novembre, y avait eu un incendie, 146 morts dans une discothèque. Le 9 novembre, le général de Gaulle meurt. Et le 16 novembre, Hara-Kiri titre « Bal tragique à Colombey, un mort ». Ça n’a pas plus du tout au ministre de l’intérieur de l’époque, Raymond Marcellin, qui ne doit d’ailleurs sa postérité qu’à cela. Interdiction d’Hara-Kiri.

A l’époque, il existait un Charlie Mensuel, dirigé par Wolinski, il a été décidé de faire une déclinaison hebdomadaire.C’est-à-dire que le fondement de l’existence de Charlie, c’est là censure de son ancêtre. Et son premier numéro va être consacré à la censure. C’est l’ADN de ce journal.

Arrive 1981, la gauche est au pouvoir, ce n’est plus le temps de la transgression, les ventes du journal s’effondrent, Dix ans d’interruption. 1992, sous la houlette de Philippe Val, l’équipe se reforme. Cabu, Wolinski, Gébé, Cavanna et Renaud, le chanteur, décident de relancer Charlie Hebdo, c’est la formule que vous connaissez aujourd’hui. Et je me revois rédigeant les statuts de ce journal – probablement bien mal, j’avais 23 ans. Par une triste ironie de l’histoire, ses créateurs avaient décidé d’appeler la société éditrice de ce journal, la « société Kalachnikov ».

Sous la houlette de Philippe Val, ce journal est devenu une pépinière de talents. Mélangeant les anciens et les modernes, Siné, Joann Sfar, Jul, Riad Sattouf, Catherine Meurisse, Fourest, Corcuff, Polac, Cavanna, Gébé, tant d’autres ont passé par là. C’est devenu un journal d’une richesse incroyable. Des crises, des ruptures, des psychodrames, il y en a eu tant que je ne peux pas m’en rappeler. Mais il y a un point sur lequel tout le monde était toujours d’accord : la liberté d’expression, la libre critique des religions, pas des hommes à raison de leur religion, ça, c’est autre chose, ça, c’est du racisme ou de l’antisémitisme. Mais la libre critique des idées, des opinions, des croyances.

Et puis, il y a eu l’attentat. Et ce journal continue à faire vivre ce rire, et ce journal continue à vivre. Il vit dans un bunker, mais il vit. Il vit entouré de policiers, mais il vit. Il vit avec des collaborateurs qui ne peuvent plus se déplacer avec leurs époux et leurs enfants, mais il vit. Il vit sous les menaces, il vit avec les disparus et les blessés, il vit avec les milliers de difficultés, il vit grâce à ses lecteurs, il vit grâce à cette merveilleuse banalité du bien, il vit grâce à l’aide de tous ceux, anonymes, qui viennent à son secours tous les jours, il vit aussi grâce à ceux que vous avez vus à votre barre, et qui vivent plus intensément et plus profondément que nous-mêmes.

Ils pourraient tous nous tuer, ça ne servirait plus à rien, parce que Charlie est devenu une idée. Et Charlie pourrait disparaître aujourd’hui, cette idée vivrait encore. On ne peut pas tuer une idée, c’est pas la peine d’essayer. Charlie Hebdo, vous en avez fait un symbole ! Vous en avez fait une idée ! On ne la tuera plus.

Ce procès a été un formidable accélérateur de l’histoire. Pendant ce procès, il y a un islam républicain qui a grandi dans ce pays, avec de nouvelles voix, et je pense en particulier au recteur de la [Grande] Mosquée de Paris [Chems-Eddine Hafiz], qui a été mon adversaire, puisqu’il était avocat en 2006 au moment du procès des caricatures de Mahomet, et qui développe aujourd’hui un discours magnifique et courageux qui lui vaut d’ailleurs à son tour d’être menacé. Il nous dit qu’il faut accepter le droit aux caricatures, et c’est important qu’il le dise.

Les discours politiques ne sont plus les mêmes non plus, ils ont évolué. Il y a beaucoup moins d’accusations d’islamophobie. Les choses bougent, il y a un éveil des consciences. Ce procès y aura contribué, et à ce titre-là, il aura été historique.

Alors ces trois mois ont été tragiques, difficiles, autant que cela serve. Autant que ce soit pour que nous ne perdions pas nos rêves, pour que nous ne perdions pas nos idéaux, pour que nous ne tournions pas le dos à notre histoire, pour que nous ne soyons pas la génération qui aurait abandonné l’histoire que je vous ai racontée, qui a abandonné ses rêves, ses idéaux, son rêve de liberté et de liberté d’expression. »

En hommage à Samuel Paty : commentaires… comment taire ?

Commentaires que m’auront inspirés durant une quinzaine de jours des articles du Monde.fr évoquant l’égorgement et la décapitation par un terroriste islamiste d’un collègue enseignant, Monsieur Samuel Paty.

Ces commentaires (même ceux proposés et refusés par la modération du Monde.fr) sont présentés ci-dessous dans leur ordre chronologique afin que quiconque le voudrait puisse étudier l’éventuelle évolution de ces commentaires d’une émotion initiale vers une réflexion plus nuancée (et moins “tripale” comme le diraient certains)

La plupart de ces articles (dont je donne les liens) doivent être réservés aux abonnés, je le crains.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/17/attentat-de-conflans-emmanuel-macron-appelle-a-faire-bloc-mais-doit-faire-face-aux-critiques_6056370_3224.html

Refusé : Le « no pasaran » des Républicains espagnols fut d’ailleurs le fier slogan démenti des futurs et pitoyables vaincus. L’idéologie séparatiste distinguant les bons fidèles des chiens de mécréants qu’il faut égorger peut en effet se répandre impunément sur nos réseaux d’a-sociaux. On verra bien, suite à l’égorgement et la décapitation de cet enseignant, quelles arrestations, expulsions et/ou condamnations frapperont les auteurs appelant au « juste châtiment » de ce « chien d’islamophobe »…

Accepté :  Le « no pasaran » des Républicains espagnols fut le fier slogan démenti des futurs et pitoyables vaincus. L’idéologie séparatiste distinguant les bons fidèles des résistants mécréants qu’il faut égorger peut en effet se répandre impunément sur nos réseaux d’asociaux hystérisés. On verra bien, suite à l’égorgement et la décapitation de cet enseignant, quelles arrestations, expulsions et/ou condamnations frapperont les auteurs appelant au « juste châtiment » de cet « islamophobe »…

« NE RECULONS PLUS », déclare le président du sénat : PUBLIONS donc urbi et orbi, dans nos journaux, nos télés, nos écoles, les dessins ou prétendues « caricatures blasphématoires » afin que chacun comprenne qu’on ne peut pas, à moins d’être un ennemi du genre humain, estimer légitime de pouvoir égorger et décapiter quelqu’un pour ça. Reprenons et publions le pathétique « Tout ça pour ça » par lequel Charlie Hebdo avait résumé l’affaire et rappelé la monstrueuse disproportion entre quelques dessins et l’atroce sort réservé à ceux qui se contentèrent pourtant de les publier en guise d’illustration du problème que pouvait poser à nos modernes et laïques sociétés un fanatisme religieux exogène.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/16/un-homme-decapite-dans-les-yvelines-le-parquet-antiterroriste-saisi-de-l-enquete_6056350_3224.html

Refusé : Et face aux réseaux organisés et hystérisés du fanatisme islamiste, face aux procès en islamophobie (c-à-d en racisme) que toute une soi-disant intelligentsia a fait et fait encore à quiconque, journalistes, hommes politiques, intellectuels ou enseignants, tenterait de nous informer sur la puissance et la nuisance du prosélytisme fascislamiste en cours, on laisse les plus courageux, les plus conscients ou les plus déterminés d’entre nous se faire condamner à mort par des réseaux d’a-sociaux haineux et diffamatoires puis égorger par des enfants tueurs qu’on aura dressés à cela.

Troisième essai (accepté) : Face aux réseaux organisés et hystérisés du fanatisme islamiste, face aux procès en islamophobie (c-à-d en racisme) que toute une soi-disant intelligentsia a fait et fait encore à quiconque, journalistes, hommes politiques, intellectuels ou enseignants, tenterait de nous informer sur la puissance et la nuisance du prosélytisme islamiste en cours, on laisse les plus courageux, les plus conscients ou les plus déterminés d’entre nous être condamnés à mort par des réseaux d’asociaux haineux et diffamatoires puis égorgés par des tueurs qu’on aura dressés à cela.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/17/apres-l-attentat-de-conflans-le-choc-des-professeurs-d-histoire-geographie-enseigner-la-liberte-d-expression-on-le-fait-tous_6056369_3224.html

Nous avons bien compris que pour n’ostraciser ni victimiser personne, ne heurter l’ignorance ou la mauvaise foi (sic) de personne, il faudra que nos intellectuels ou nos enseignants renoncent à répandre les moindres Lumières qui pourraient passer pour déplacées, choquantes ou blasphématoires aux yeux de ceux qui au nom de leurs convictions idéologiques ou de leur obscurantisme religieux prétendent dorénavant nous replonger dans les ténèbres de la superstition auxquelles nous pensions depuis un ou deux siècles être en train d’échapper. 

Reconnaissons au moins que c’est une nouvelle guerre civile que l’obscurantisme religieux nous fait, et prenons acte qu’en réponse il nous faut organiser une nouvelle et militante résistance anticléricale ou athée, à laquelle les croyants de toute obédience devraient s’associer s’ils voulaient nous convaincre de leur esprit de tolérance et du respect d’une laïcité permettant l’expression de toutes les convictions, religieuses ou athées.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/17/apres-l-attentat-de-conflans-le-senat-examinera-une-proposition-de-loi-constitutionnelle-sur-la-laicite_6056390_3224.html

Si la gauche ou la majorité LRM avait du mal à acter par la loi ou la constitution que « nul individu ou nul groupe ne peut se prévaloir de son origine ou de sa religion pour s’exonérer de la règle commune», on se demande comment le pays ne pourrait pas, très prochainement, s’empêcher de voter résolument à droite ou à l’extrême droite.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/16/un-homme-decapite-dans-les-yvelines-le-parquet-antiterroriste-saisi-de-l-enquete_6056350_3224.html

réponse @Constat17/10/2020 – 05H32

Puisque c’est au nom d’Allah que ce compatriote enseignant a été décapité, il me semblerait normal qu’on laisse nos compatriotes adorateurs d’Allah régler le compte de ceux qui parmi eux les feraient passer pour des ennemis de la nation et des égorgeurs de nos enseignants. Que chaque compatriote musulman soit maintenant mis devant sa responsabilité soit de s’engager dans la résistance au fascislamisme soit d’en être, par sa passivité, le complice.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/17/attentat-de-conflans-un-hommage-national-sera-rendu-a-l-enseignant-assassine-vendredi-annonce-l-elysee_6056408_3224.html

« Hommage national » auquel n’auront sans doute pas le droit de publiquement s’associer certains des élèves mêmes de cet enseignant égorgé et décapité au nom de Dieu : on craindra pour eux que leur présence à cet hommage ne soit prise comme un signe d’islamophobie et donc les expose à l’hystérie vengeresse des nouveaux fascistes qui vivent parmi nous.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/17/enseignant-decapite-a-conflans-sainte-honorine-face-a-la-terreur-defendre-la-liberte-d-expression_6056399_3232.html

refusé : Le Monde pourrait illustrer la liberté d’expression dont il se prétend un ardent défenseur en publiant lui aussi (et en invitant d’autres médias à le faire) la récente Une de Charlie qui rappelait, au moment du procès des impliqués dans l’attaque terroriste qui massacra sa rédaction,
« Tout ça pour ça ! » : Tant de journalistes abattus à bout portant pour quelques dessins tenant de cerner les limites de la liberté d’expression. Et maintenant un professeur égorgé et décapité pour avoir, dans le cadre de sa mission, invité à réfléchir lui aussi sur de tels dessins. 

Par ailleurs, question liberté d’expression, il serait temps que la modération locale se soucie elle-même de respecter sa charte et ne pratique pas une aveugle censure fondée sur des mots clés détachés de leur contexte.

Accepté : Nos médias pourraient aussi illustrer la liberté d’expression défendue dans les éditoriaux en publiant la récente Une de Charlie qui rappelait, au moment du procès des impliqués dans l’attaque terroriste qui massacra sa rédaction, « Tout ça pour ça ! » : Tant de journalistes abattus à bout portant pour quelques dessins tentant de cerner les limites de la liberté d’expression. Et maintenant un professeur égorgé et décapité pour avoir, dans le cadre de sa mission, invité à réfléchir lui aussi sur de tels dessins. 

Par ailleurs, question liberté d’expression, comment justifier une modération un peu trop aveuglément fondée sur des mots clés détachés de leur contexte ?

@ChP : A partir du moment où ce sont les religions au prosélytisme le plus actif voire parfois le plus terrorisant qui s’opposent le plus à la liberté d’expression, n’est-il pas normal que ce soient les oeuvres interdites par ces religions qui soient analysées et proposées à la réflexion de tous  afin d’illustrer la notion de terrorisme religieux ?

@ChP : Laïque : qui garantit la liberté de croire ou de ne pas croire, qui garantit le droit à vivre sa foi ou sa superstition aussi bien que son athéisme ou son souci de répandre des Lumières dans l’obscurantisme superstitieux ; qui doit permettre le cléricalisme et donc l’anticléricalisme appelé à lui résister. En 4e on a atteint l’âge de raison et on doit accepter qu’on tente de former en vous le futur citoyen qui quelques années plus tard sera appelé à décider (avec d’autres citoyens et pas seulement avec son Dieu) de la loi qui s’appliquera à tous.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/18/attentat-de-conflans-comment-un-incident-mineur-est-devenu-hors-de-controle_6056460_3224.html

Refusé : Si au moins le Monde nous proposait une reproduction de ce ridicule dessin où l’hystérie obscurantiste trouva son prétexte à lancer une chasse à l’homme puis à obtenir sa mise à mort, conformément au rituel de la barbarie qui lui est propre. Nous pourrions alors nous-mêmes nous faire une idée de ce que peut être, dans notre société qui se croit libérale et laïque, un sacré « détail qui tue ».

Enseignant (retraité), je sais combien vite on peut choquer des élèves, mal faire en croyant bien faire. Je sais aussi combien il est facile de les séduire (comme tout bon ‘joueur de flûte’ sait séduire et détourner des enfants depuis la nuit des temps). Je sais surtout que, fondamentalement, « éduquer », c’est « ex-duire », conduire hors de, sortir du milieu familial ou traditionnel l’enfant (fruit des entrailles de parents) pour en faire un élève (fruit des efforts d’une nation). Cela ne va pas, ne peut aller sans que l’enfant puisse parfois être choqué par des savoirs qu’on peut lui proposer, savoirs qui s’opposeraient à des savoirs antérieurs ou certitudes familiales. De même que l’E.N. propose aux profs de français une vaste liste d’ouvrages parmi lesquels choisir les lectures pour leur classe, de même on devrait proposer aux profs d’EMC une vaste bibliothèque d’illustrations et textes où puiser pour leur enseignement.

 @ MarcD : Vous donnez un bon exemple de séparatisme approuvé sinon vanté par nos médias dans leur souci de vanter la tolérance de cet enseignant néanmoins égorgé par l’intolérance : en permettant que certains de ses élèves puissent, au nom de leur religion, se dispenser de certaines leçons de démocratie élémentaire (laquelle ne peut exister qu’entre citoyens acceptant de débattre ensemble puis de se plier aux décisions majoritaires librement exprimées), on fait justement le lit du séparatisme, voire des diverses formes de guerres de sécession que cela risque d’entraîner.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/19/apres-l-attentat-de-conflans-le-collectif-contre-l-islamophobie-en-france-dans-la-ligne-de-mire_6056529_3224.html

De nos jours, être accusé d’islamophobie revient à être accusé de racisme, comme si une idéologie était une race, comme si on n’avait pas le droit de combattre une idéologie par une autre idéologie, comme si le cléricalisme politico-religieux des islamistes ne devait pas justifier la résistance anticléricale qu’il nécessite, comme si la séparation entre bons fidèles et mauvais mécréants (à convertir ou à éliminer) pouvait être prônée au sein de la même nation. Pire, de nos jours, être traité d’islamophobe revient à se faire coller une cible dans le dos et à entendre bruire autour de vous les appels à votre meurtre.

https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/10/19/emmanuel-macron-face-a-l-emotion-nationale-suscitee-par-l-attentat-de-conflans_6056530_823448.html

Pourvu que les actuels responsables politiques de notre encore un peu tempérée mais déjà fragile démocratie comprennent enfin que tout recul devant le prosélytisme islamiste entraînera une avancée de l’extrême droite et l’aggravation des tensions entre compatriotes de toutes origines ou convictions.

https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2020/10/19/darmanin-annonce-vouloir-dissoudre-plusieurs-associations-dont-le-ccif-et-barakacity-qualifiees-d-ennemies-de-la-republique_6056551_1653578.html

 La « démonstration » ne doit pas seulement se « vouloir musclée » (et se prêter à l’ironie de ceux qui continueront à se moquer des forces de l’ordre républicain de notre pays), elle doit être musclée et déterminante pour le rétablissement de nos libertés essentielles menacées par l’intolérance d’un prosélytisme théocratique de plus en plus agressif et mortifère partout où il s’est répandu. 

Si ce n’est pas le gouvernement actuel qui le fait, ce sera l’extrême droite à laquelle on accordera dans deux ans ce redoutable privilège.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/19/ca-suffit-la-trouille-de-heurter-des-hommages-a-samuel-paty-entre-revolte-et-sideration_6056561_3224.html

Merci pour ce reportage, notamment pour le passage où il montre que l’essentiel du débat se passera entre compatriotes musulmans, entre ceux qui auront le courage d’entrer en résistance contre le totalitarisme religieux non seulement prêché mais imposé par les autres.

Et c’est à la République d’aider et de soutenir, par ses lois et son engagement, la résistance de ces compatriotes soucieux de faire nation ensemble. Une chose est sûre, nous ne gagnerons pas le combat contre l’obscurantisme théocratique sans l’engagement de ceux à qui on prétend le faire subir en premier ou même dont on voudrait assigner le destin à leur naissance.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/18/attentat-de-conflans-comment-un-incident-mineur-est-devenu-hors-de-controle_6056460_3224.html

Ceux qui estimeraient que le dessin choisi par M. Paty pour déclencher avec ses élèves le débat qu’il pouvait mériter n’était pas adéquat ou choquant (cela aurait d’ailleurs été anticipé par l’enseignant, nous dit-on, mais que ne nous dit-on pas ?) devraient quand même être conscients qu’ils se posent en juge du travail d’un professionnel dont ils ne connaissent par ailleurs ni les méthodes ni le public, ni le contexte pédagogique de la séquence. 

Peut-être leur suffit-il de savoir ce que dessin émane de Charlie Hebdo et qu’il ne peut donc, dans l’absolu, qu’être grossier, provocateur ou satanique. Peut-être aussi qu’après l’attentat qui massacra sa rédaction, Charlie Hebdo aurait-il dû disparaître, puisque, après ce massacre, il ne pouvait plus jamais être le journal bête et méchant qu’il ambitionnait modestement d’être. Peut-être que M. Paty souhaitait justement, par défi et résistance, être de ceux qui auront refusé cette seconde mort d’un journal déjà massacré.

@ Paul RIOU :  Merci de noter l’incongruité qu’il a, en effet, à qualifier « d’incident mineur » ce qui relève de la manipulation prosélytique professionnelle, de la part de militants qui savent qu’il faut savoir se victimiser pour avoir le droit d’accéder au statut de bourreau.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/19/attentat-de-conflans-nous-etions-convaincus-que-ca-allait-mal-finir_6056528_3224.html

Vivement que l’Etat prenne les décisions et les surtout les mesures permettant de mettre le pays à l’abri de la guerre civile dont certains, depuis deux décennies, répandent les braises mortelles jusque dans nos foyers et nos écoles !

Faudra-t-il attendre que les prosélytes et provocateurs islamistes soient, à leur tour, condamnés à vivre sous protection policière, comme s’y résignent depuis des années trop de nos compatriotes qui auront osé entrer en résistance contre le totalitarisme théocratique ? Et où trouverions-nous tous ces policiers pour nous protéger alors qu’eux-mêmes ne peuvent pas toujours compter sur la nation pour les protéger ?

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/19/abdelhakim-sefrioui-un-vieux-routard-de-l-islamisme-en-france_6056581_3224.html

Pour ceux qui n’auraient toujours pas entrevu où mènent les chemins pavés par les rêves, les nostalgies ou les ressentiments de ce genre de « vieux routard », ni constaté chez beaucoup de ces militants toujours prêts à monter au Front la mortelle proximité idéologique entre nouvel antisionisme, antisémitisme et islamisme.

https://www.lemonde.fr/education/article/2020/10/19/liberte-d-expression-beaucoup-d-enseignants-redoutent-d-etre-juges-pour-des-difficultes-rencontrees-en-classe_6056526_1473685.html

Enseignant (retraité), je sais combien vite on peut choquer des élèves, mal faire en croyant bien faire. Je sais aussi combien il est facile de les séduire (comme tout bon ‘joueur de flûte’ sait séduire et détourner des enfants depuis la nuit des temps). Je sais surtout que, fondamentalement, « éduquer », c’est « ex-duire », conduire hors de, sortir du milieu familial ou traditionnel l’enfant (fruit des entrailles de parents) pour en faire un élève (fruit des efforts d’une nation). Cela ne va pas, ne peut aller sans que l’enfant puisse parfois être choqué par des savoirs qu’on peut lui proposer, savoirs qui s’opposeraient à des savoirs antérieurs ou certitudes familiales. De même que l’E.N. propose aux profs de français une vaste liste d’ouvrages parmi lesquels choisir les lectures pour leur classe, de même on devrait proposer aux profs d’EMC une vaste bibliothèque d’illustrations et textes où puiser pour leur enseignement.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/19/ne-plus-mourir-d-enseigner_6056571_3232.html

@Langsam Woyzeck : intéressant que vous ayez pensé au sacrifice d’Isaac,  fils unique d’Abraham auquel Dieu aurait demandé de le lui sacrifier pour lui prouver sa foi… avant, au dernier moment, de lui faire comprendre que ce n’était qu’une plaisanterie pour voir jusqu’où allait sa foi et sa soumission à ce qui lui était présenté comme un ordre de Dieu. Utile serait de rappeler que tout prophète prétendant commander un meurtre au nom de Dieu ne peut être qu’un imposteur dont Dieu lui-même devra contrecarrer les noirs desseins. 

@marie-claude Lemoine : Peut-être faudrait-il rappeler que toute lecture est faite par un lecteur qui la reçoit avec son propre imaginaire, ses propres projections, refoulements ou fantasmes, etc. Bref, il y a autant de lectures diverses d’un même livre, donc finalement autant de livres divers à partir du même, que de lecteurs divers de ce livre. Ainsi il y a autant de Coran qu’il y a de lecteurs le lisant, l’apprenant, le comprenant, le commentant, etc. Autant de Coran(s) différents que de musulmans différents. Le Coran ne sera donc jamais autre chose que ce qu’en feront ses lecteurs ou fidèles. C’est pourquoi, ce n’est jamais un livre qu’il faut critiquer mais ses éventuels lecteurs. Surtout ceux qui le prétendraient intangible et sacrée Parole de Dieu alors qu’il ne sera jamais que la Lecture d’un être humain.

Si au Monde comme dans d’autres médias et faiseurs d’opinion on avait rappelé que les établissements de l’E.N. sont les sanctuaires où s’élèvent (sic) les futurs citoyens d’une même République laïque s’instaurant au profit des droits de l’Homme au sein d’une commune et universelle humanité, on aurait peut-être pu plus facilement résister et triompher de ceux qui osaient venir nous en imposer au nom de leur sacré particulier. Beaucoup de temps aura été perdu (et de vies aussi !) à force de vouloir reconnaître des différences de droits au nom des droits à la différence. Et le Monde, dans ce qu’il aura estimé sa bienveillance humaniste ou humanitaire, n’aura pas été un des moins influents à justifier de tels différencialismes identitaires et si souvent, hélas, mortifères.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/20/le-tragique-submerge-le-quinquennat-d-emmanuel-macron_6056642_3232.html

Disons qu’avec la répétition d’attentats de plus en plus innommables  (ne serait-ce que depuis 8 ans, depuis qu’un jeune sauvageon (in)élevé parmi nous s’en prit à nos soldats, avant de s’en prendre à une famille juive, dont une fillette tuée à bout portant, en passant par les journalistes, les policiers, des compatriotes en terrasse, en concert, en 14 juillet eux aussi abattus ou écrasés), c’est TOUT LE PAYS qui s’enfonce dans une espèce de crépuscule à la fois obscurantiste et tragique (situation dans laquelle il n’y a plus de bonne solution, où il ne peut plus y avoir que des victimes et de la souffrance).

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/20/gilles-kepel-la-loi-contre-le-separatisme-doit-traiter-les-causes-et-non-les-seules-consequences_6056644_3232.html

Lorsque Kepel écrit : “C’est tout le défi de l’élaboration de la nouvelle loi, qui doit traiter les causes et non les seules conséquences”, on voit bien les pistes qu’il propose et qu’il en appelle à un combat à la fois idéologique et législatif :  c’est le prosélytisme islamiste (à ne pas confondre avec l’islam qui est une religion) qui doit être combattu par un prosélytisme républicain et laïque appuyé sur les lois adéquates, et non seulement ses sicaires traqués ou le plus souvent, hélas, neutralisés après leur crime.

@le sceptique : On doit pouvoir distinguer croyance et manipulation idéologique (dont on peut être l’auteur ou la victime). Autant je vois moins ce qu’il y aurait à reprocher à un livre (fût-il dit saint) qu’à la lecture que certains en feraient. Il y autant de Coran(s) différents que de lecteurs différents de ce livre. C’est ce que des musulmans prétendent tirer du Coran qui doit éventuellement être questionné ou rejeté. La foi, la croyance, c’est affaire de soi à soi, de soi à  à sa foi, de soi à son Dieu et ne doit pas concerner autrui. Une idéologie par contre doit pouvoir être combattue par toute idéologie opposée qui l’estimerait dangereuse ou se prétendrait plus éclairée. Un Etat démocratique doit assister par la loi le combat en faveur des libertés contre ceux qui veulent répandre leurs interdits.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/19/a-gauche-l-appel-a-l-unite-face-aux-accusations-de-laxisme_6056570_3224.html

“Prendre le mal à la racine”, ce n’est pas espérer pouvoir un jour se donner les moyens de traquer, arrêter ou neutraliser ceux qui en auraient été infectés, c’est mener préventivement le combat idéologique contre l’idéologie qui s’est avérée plus mortelle ou barbare qu’on ne l’avait craint. 

Ce ne sont pas les soldats, enfants juifs, journalistes, prêtres, compatriotes en terrasse, en concert ou en 14 juillet ou maintenant des enseignants qui doivent être protégés de la barbarie aveugle qui peut s’abattre sur eux, c’est à la barbarie aveugle elle-même et à l’idéologie qui la répand qu’il faut mener le combat idéologique et législatif nécessaire.

Pour le moment, la gauche (surtout celle qui se veut « vraie » ou « radicale ») y a failli et s’est même ici ou là aveuglée voire faite complice d’un certain prosélytisme obscurantiste dont on ne peut plus pourtant depuis près de deux décennies ignorer la nocivité mortifère.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/21/attentat-de-conflans-comme-de-nombreux-professeurs-je-me-sens-honteux-d-appartenir-a-une-institution-si-faible_6056778_3232.html

Dans cette réflexion d’un témoin direct engagé sur le “front” scolaire, je souhaiterais surtout souligner ce passage qui propose utilement plus à réflexion qu’à polémique : 

 » Deux raisons principales à cette réticence d’un corps de métier à nommer la violence dont il est victime, réticence qui fait son courage paradoxal… La première est que si les professeurs ont tendance à trouver des excuses aux jeunes gens brutaux, c’est que le sens de leur métier est de les accompagner, de les mener patiemment hors de l’adolescence. Au fond, le professeur s’inscrit dans une forme de compagnonnage avec l’élève, à l’écart du monde adulte et pour l’y préparer. Il ne conçoit pas l’élève comme un adversaire mais comme un protégé, presque comme un ami. Dans ces conditions, les réticences du corps professoral à dénoncer les écarts de conduite de ses ouailles seront toujours très fortes.« 

On sait que ce métier s’est en outre fort féminisé ces derniers temps, avec des formes de maternage souvent excessivement compréhensives devant des dérapages pourtant inacceptables de jeunes mâles.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/21/attentat-de-conflans-lors-de-son-audition-samuel-paty-a-nie-avoir-voulu-stigmatiser-les-musulmans_6056814_3224.html

 @ MBS (et autres intervenants ci-dessous) : Le drame en l’affaire, c’est que tout dessin ou caricature cherchant à illustrer la liberté de la presse  est devenu quasi impossible depuis que la rédaction de Charlie Hebdo a été massacrée à cause de dessins (dénoncés comme d’insupportable blasphèmes méritant la mort). Ne pas s’appuyer sur ces mortifères dessins de Charlie revient à enterrer Charlie une deuxième fois. Les présenter, fût-ce pour permettre de les critiquer, revient à être accusé de complicité avec le mauvais goût « bête et méchant » d’un hebdo qualifié en outre d’islamophobe (donc de raciste) par qui cherche à faire confondre religion, race, idéologie, assignation identitaire, etc.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/20/attentat-de-conflans-une-minute-de-silence-le-2-novembre-dans-les-etablissements-scolaires_6056704_3224.html

@ Paxwax (et commentateurs ci-desous) : Avant de juger, accordons-nous le temps d’être instruits : les enquêteurs et metteurs en examen savent mieux que nous ce que ces jeunes auront dit ou fait le jour en question, mais aussi ce qu’ils auront dit ou fait les jours précédents, et leurs éventuelles et préalables complicités accusatrices contre un prof accusé d’être islamophobe ou blasphémateur méritant d’être puni…  Quoi qu’il en soit, les 300 € évoqués rappellent forcément les 30 deniers reçus par Judas pour dénoncer son meneur, trahison après laquelle d’ailleurs il se suicida lorsqu’il eut compris l’horreur que sa dénonciation avait entraînée.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/21/information-judiciaire-pour-violences-a-caractere-raciste-ouverte-dans-l-affaire-des-femmes-agressees-au-champ-de-mars_6056846_3224.html

Refusé : Question atmosphère « islamophobe », on inviterait volontiers Maître Alimi à lire ou relire la récente contribution de M. Kepel parue dans le Monde.fr.

Par ailleurs, dans l’ambiance de guerre civile endémique (et déjà ici ou là de plus en plus réelle et barbare) que certains imposent au pays, comment peut-on encore permettre d’y confondre « islamistes » et « musulmans », islamisme (idéologie mortifère) et islam (religion que l’on peut pratiquer sans le faire savoir urbi et orbi, de visu ou de exorbitu).

Ces deux femmes ont visiblement été victimes de deux imbéciles dont les pulsions racistes auront été débridées par l’interpellation qu’elles auront subie. Ces deux imbéciles particulières doivent être punies, sans qu’il soit nécessaire d’incriminer une fois de plus, et maintenant décidément une fois de trop, l’atmosphère prétendument islamophobe du pays.

Deuxième essai (accepté) : Question « atmosphère », on inviterait volontiers Maître Alimi à lire ou relire la récente contribution de M. Kepel parue dans le Monde.fr.

Par ailleurs, dans l’ambiance de guerre civile endémique (de plus en plus barbare) que certains imposent au pays, comment peut-on encore se permettre d’y confondre « islamistes » et « musulmans », islamisme et islam, idéologie mortifère et religion que l’on peut pratiquer dans une discrétion républicaine comme d’autres pratiquants.

Ces deux femmes ont visiblement été victimes de deux personnes dont les pulsions racistes auront été débridées par l’interpellation qu’elles auront subie. Ces deux particulières doivent être punies, sans qu’il soit nécessaire d’incriminer une fois de plus, et maintenant de trop, l’atmosphère prétendument islamophobe du pays.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/21/une-deroutante-cecite-americaine-face-au-phenomene-du-djihadisme-dans-l-hexagone_6056765_3232.html

Merci à ces deux intellectuels américains de la confiance que dans leur phrase de conclusion ils témoignent à notre pays et à sa démocratie.

Si en France devait (continuer de) triompher la même « gauche humaniste » que celle qui impose ses errances aux USA, il ne faudra pas s’étonner qu’une Le Pen finisse par arriver au pouvoir comme un Trump y est arrivé là-bas. 

Au royaume des aveugles, pas étonnant que la fille d’un borgne finisse reine.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/21/attentat-de-conflans-le-piege-de-nos-debats-se-referme-sur-notre-vie-democratique_6056793_3232.html

Une “alternative sans issue” serait plutôt un dilemme… 

Or, les distinctions que rappelle M. Dubet (l’islam-religion n’est pas à confondre avec l’islamisme-idéologie, ni un musulman avec un islamiste) illustrent bien le combat commun que nous avons à mener entre compatriotes contre l’idéologie mortifère (l’islamisme) qui nous a déclaré la guerre, comme elle l’a déclaré dans d’autres pays aux musulmans eux-mêmes. 

Nous ne pouvons pas attendre d’avoir réalisé une parfaite justice sociale pour entrer dans une résistance déterminée au fascisme aussi identitaire que barbare qui menace notre pays, notre démocratie et sa population (quelles que soient ses origines, convictions ou confessions).

 @PMF : tentative de clarification : 1 Une religion (l’islam comme une autre) peut (devrait) se pratiquer avec une discrétion républicaine : nul concitoyen n’est obligé de savoir quelles sont vos convictions religieuses ou philosophiques.  2 L’adhésion à une idéologie (prosélytisme religieux pour la religion qu’on estimerait la seule bonne ou juste ; militantisme politique pour un régime qu’on estimerait le seul digne ou juste) implique le plus souvent diverses démarches de promotion ou de dénonciation qui peuvent se trouver en opposition avec d’autres démarches ou convictions militantes : le cléricalisme peut entraîner l’anticléricalisme. Et plus la concurrence idéologique ou religieuse sera active, plus vite elle peut entraîner animosités voire parfois guerre civile religieuse, comme cela s’observe notamment dans les régimes totalitaires ou théocratiques.

https://www.lemonde.fr/livres/article/2020/10/21/journal-d-un-rescape-du-bataclan-de-christophe-naudin-un-prof-face-a-daech_6056859_3260.html

@Nadi : Proposition de réponse à votre question : En ne confondant plus l’islamisme (idéologie) et l’islam (religion). En sachant que toute idéologie totalitaire doit appeler une résistance totale. En vous souvenant que beaucoup de musulmans, en s’opposant à la dictature qu’ils subissent dans leur pays ou aux pressions dans leur quartier, ont déjà eu plus de courage que nous… Enfin, en refusant la notion d’islamophobie, cette arme de destruction massive de la laïcité.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/23/le-decalage-est-vertigineux-entre-l-etendard-de-la-liberte-d-expression-brandi-par-macron-et-le-quotidien-d-enseignant-et-d-artistes-qui-s-autocensurent_6057032_3232.html

Et c’est bien parce que nous ne pouvons plus compter sur la gauche (dont pourtant nous sommes) qu’est sans doute tragiquement perdu notre combat pour la laïcité, le refus de l’assignation à une couleur de peau, à une religion de naissance ou à une origine, bref pour l’universalisme des droits de l’Homme. Citoyens d’une gauche humaniste, républicaine et social-démocrate nous sommes renvoyés à l’extrême droite dès que nous ne consentons pas aux slogans indigénistes, tiers-mondistes ou carrément néoracistes des ‘racisés’. 

Bref, on est tellement battu par le fanatisme religieux ou partisan qu’on se sent bouillir d’une amertume d’autant plus rageuse qu’elle est impuissante et risque de nous faire… perdre la tête aussi.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/23/mireille-delmas-marty-nous-basculons-vers-un-droit-penal-de-la-securite_6057057_3232.html

Si au moins « l’imagination, éclairée par la connaissance et stimulée par « l’émerveillement  » de faire partie de cette extraordinaire aventure du vivant »… pouvait nous empêcher de perdre la tête en sortant d’un cours avec des élèves auxquels nous aurions voulu apprendre à être de futurs concitoyens respectueux des droits élémentaires de l’Homme et du citoyen…

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/23/polemique-apres-les-propos-de-jean-michel-blanquer-sur-l-islamo-gauchisme-a-l-universite_6057164_3224.html

Islamo-gauchisme : est-ce le mot ou la chose qui pose problème ? 

Lorsque des gens qui se prétendent de ‘gauche’ expliquent que critiquer le prosélytisme idéologique d’islamistes prônant la suprématie de lois religieuses sur les lois civiles revient à être ‘islamophobe’ (c-à-d à être raciste), lorsque cette gauche manifeste avec des islamistes pour appuyer leurs slogans et prétentions, trouve des excuses sociologiques à l’idéologie terroriste internationale qui nous fait perdre la tête, comment ne pas recourir à un signifiant exprimant si bien la réalité de certains incompréhensibles rapprochements ?

Oui, mais cette expression a déjà été préemptée par l’extrême-droite, dira-t-on… Et alors ? Devrait-on aussi laisser à l’extrême-droite des mots comme Nation, France ou République parce qu’elle les aurait ramassés lorsque nous, à gauche, les avons abandonnés ? Et parce qu’elle brandirait maintenant le mot « laïcité », devrions-nous aussi lui laisser ce mot et ce combat ?

@Gaspard : ce sont les islamistes qui ont médiatisé le terme ‘d’islamophobie’ pour empêcher toute critique de l’idéologie islamiste en la réduisant à un prétendu racisme anti-musulmans. C’est une imposture sémantique qu’il aurait fallu refuser dès le début. Quant à ‘l’islamistophobie’ (pour évoquer la crainte aussi criante que légitime que peut inspirer le cauchemar islamiste), c’est un terme que j’avais pour ma part aussi suggéré depuis longtemps, mais il n’a pas été retenu par nos médias. Depuis, il est devenu clair pour tout le monde que c’est une légitime résistance idéologique et culturelle qu’il faut opposer à l’islamisme, cette idéologie mortifère qui n’a rien à faire avec l’islam, religion censée permettre le lien intime avec sa foi et son dieu sans que cela cherche à en imposer à autrui.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/24/fermeture-de-la-mosquee-de-pantin-le-salafiste-l-affairiste-et-les-politiques_6057196_3224.html

« C’était sûr que ça allait se terminer comme ça un jour… Les fidèles paient la facture des nombreuses fautes des dirigeants. » 

Et les modérés qui ne se seront pas bougés à temps pour protester contre les dérives terroristes commises en leur nom payeront pour les prosélytes et autres activistes qui auront permis les pires amalgames. Bientôt, c’est au coeur de notre république que des gens finiront par se dire : Qui n’est pas avec nous pour dénoncer la menace de l’obscurantisme fanatique et de ses horreurs sera dénoncé comme complice de cet obscurantisme. Les Français aussi sont des hommes après tout, pas des moutons à décapiter.

https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/24/l-elysee-denonce-les-propos-inacceptables-d-erdogan-sur-macron_6057265_3210.html

Il est clair qu’Erdogan est un va-t-en-guerre… L’ennui, c’est qu’il dispose, sur notre sol, de milliers d’admirateurs dont il lui sera facile de faire jouer la fibre nationaliste soit panturque soit impérialiste néo-ottomane. 

Nous vivons des temps épiques-et-colère-gramme-, sans être sûrs de disposer d’enfants encore prêts à « entrer dans la carrière pour y trouver dans la poussière les traces des vertus de leurs ancêtres »…

https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/24/apres-les-propos-de-macron-sur-les-caricatures-de-mahomet-plusieurs-pays-du-moyen-orient-appellent-au-boycott-des-produits-francais_6057268_3210.html

Bref, la France devrait laisser égorger ses enfants sans protester, en pensant juste ‘Mektoub’, ou en estimant que tout pays imprégné d’islam(isme) devrait accepter sans rechigner d’être soumis à la sainte loi du Sabre… ?

Pourtant le mythique récit d’Abraham (ds la Bible) – Ibrahim (ds le Coran) invité à renoncer au dernier moment au sacrifice de son fils Isaac rappelle que même lorsque des ‘voies divines’ ou des interprètes prétendant parler au nom de Dieu auraient appelé un père à tuer son enfant, Dieu lui-même envoie un ange pour empêcher le sacrifice. Or, qu’est-ce qu’un enseignant, sinon l’enfant qu’une nation aura formé pour se perpétuer ?

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/25/professeur-decapite-blanquer-promet-une-feuille-de-route-pour-les-enseignants-a-la-rentree_6057279_3224.html

Ne pas confondre parents et enfants (fruits de leurs entrailles) avec professeurs et élèves (fruits de la nation et, autant que possible, de l’humanité universelle). N’importe quel géniteur peut accéder au noble statut de parent et se soucier de ‘son’ enfant, alors que pour devenir enseignant, il y faut une réelle volonté (voire une espèce de vocation), une longue formation et enfin une cooptation par des pairs chevronnés, en vue de former les futurs citoyens d’un pays.

On appréciera que les responsables de l’E.N. aient pris conscience qu’il fallait sérieusement faire quelque chose pour tenter d’organiser la riposte morale et éducative que le monde enseignant devra opposer aux dérives autorisées ou supportées depuis des années. Mais le lundi 2 novembre (symbolique jour des ‘Trépassés’, au calendrier) ne sera que le premier et funèbre pas d’une longue marche de reconquête pédagogique et citoyenne, dont il n’est pas sûr que nous soyons à la hauteur avec notre état d’esprit actuel fait de divisions, procès d’intentions et polémiques.

https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/25/rien-ne-nous-fera-reculer-macron-garde-le-cap-face-a-la-colere-d-une-partie-du-monde-musulman_6057331_3210.html

Si le monde musulman confond lui-même légitime critique de la mortifère idéologie islamiste et respect de l’islam et des musulmans…

https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/25/paris-denonce-une-propagande-haineuse-et-calomnieuse-de-la-turquie-visant-la-france_6057308_3210.html

Faudra-t-il rappeler qu’à l’aube des temps modernes l’Europe (chrétienne) n’a su s’unir et se construire son identité que face aux pressions et oppressions que la conquêtes ottomane lui imposait ? Si l’UE ne s’unissait pas maintenant pour résister aux provocations du néoimpérialisme ottoman, combien de temps sa civilisation et ses libertés survivraient-elles ?

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/24/conflans-comment-le-terroriste-a-cherche-d-autres-cibles-sur-les-reseaux-sociaux-avant-samuel-paty_6057197_3224.html

Pour qui n’aurait toujours pas compris que les caricatures prétendument islamophobes de Charlie ou autres « provocations » ne sont que prétexte au prosélytisme mortifère de l’idéologie islamiste.

https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/10/21/attentat-de-conflans-macron-declare-la-guerre-a-l-islam-politique-au-risque-de-la-cacophonie-gouvernementale_6056770_823448.html

Il ne devrait pas être trop compliqué de dissoudre des associations construites sur un prosélytisme mensonger : lorsque le CCIF oeuvre depuis des années pour expliquer que toute critique idéologique de l’idéologie islamiste est une phobie raciste, n’est-il pas en pleine imposture, en pleine diffamation publique de tous les défenseurs de la laïcité ainsi traités de racistes ?

https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/26/entre-emmanuel-macron-et-recep-tayyip-erdogan-les-relations-n-ont-jamais-ete-aussi-delitees_6057354_3210.html

@Marius : nous n’avons pas attendu des islamistes pour trouver tantôt fort (im)pertinents tantôt nuls ou grossiers certains dessins ou caricatures publiées ici ou là dans notre presse. Mais à partir du moment où la publication de certains dessins illustrant le risque qu’il y a à représenter tel saint personnage de telle religion (la question avait été posée à des illustrateurs danois refusant d’illustrer une vie de Mahomet) a entraîné le massacre de toute la rédaction d’un de nos hebdos, vous comprendrez bien que ces caricatures mêmes font désormais partie de la tragique histoire de notre pays et de l’inlassable lutte qui doit être menée contre le fanatisme.

https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/26/c-est-une-situation-de-guerre-totale-dans-le-haut-karabakh-l-armenie-tente-d-attirer-l-attention-de-la-communaute-internationale_6057350_3210.html

« Herr Dogan » (merci pour cette trouvaille d’un commentateur ci-dessous) pourrait bien être en train de rêver de se la jouer Führer du monde musulman, n’hésitant devant aucune provocation pouvant se faire applaudir comme tel… 

Jeu dangereux s’il en est, pour lui, pour nous, pour nos compatriotes d’origine turque ou de confession musulmane qui se laisseraient enthousiasmer par ce genre de manipulation.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/27/darmamin-le-ccif-une-officine-islamiste-qui-uvre-contre-la-republique_6057466_3224.html

Le CCIF base toute sa communication sur l’affirmation que vouloir résister au prosélytisme d’une idéologie théocratique mortifère serait du racisme. Rien que pour cette imposture, pour cette diffamation publique et réitérée, il aurait dû être interdit sinon poursuivi pour mauvaise foi (sic) nuisible à la paix civile.

Les islamo-gauchistes (sic) qui rangent à l’extrême droite les républicains de gauche (dont je suis) soucieux de défendre la laïcité, gage de nos libertés et de la paix civile, qu’ils ne s’étonnent pas de pouvoir ranger demain tout le pays à l’extrême droite.  Mais surtout, en attendant, qu’ils prennent conscience qu’ils insultent tous nos compatriotes musulmans assez républicains pour se mobiliser avec le reste de la nation contre l’entrisme d’une idéologie exogène prônant le fanatisme identitaire et l’assignation aux hasards de la naissance.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/26/recep-tayyip-erdogan-le-sultan-pyromane_6057395_3232.html

De même que l’agressivité et l’esprit de conquête de l’impérialisme ottoman a fini du 16e au 19e siècle par forcer l’Europe à s’unir contre lui et lui opposer finalement une résistance triomphante, il ne serait pas impossible que l’agressivité de celui qui se  rêve le nouveau sultan rappelle à l’UE combien il importe qu’elle s’unisse politiquement et culturellement contre le chantage ou les rodomontades d’étrangers qui prétendraient venir imposer leur idéologie voire leur loi jusque dans nos écoles et les lieux de culte de nos compatriotes originaires de ces pays étrangers.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/28/clementine-autain-sur-le-combat-contre-le-terrorisme-j-alerte-la-france-est-en-passe-de-perdre-pied_6057616_3232.html

Peut-on s’excuser de ses aveuglements en reprochant à autrui d’être borgne ?

https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/27/colere-grandissante-du-monde-musulman-contre-emmanuel-macron_6057541_3210.html

Pour qui n’aurait toujours pas compris ce qu’est une religion de paix et de tolérance dont les fidèles peuvent prêcher leur amour non seulement dans leurs rues ou lieux de culte, mais venir nous l’expliquer jusque dans nos écoles…

https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/26/crise-diplomatique-au-moyen-orient-deux-valeurs-sacro-saintes-s-affrontent-le-respect-du-religieux-et-la-liberte-d-expression_6057433_3210.html

Si déjà certains musulmans n’avaient pas commencé par caricaturer l’islam : il ne peut y avoir d’anticléricalisme qu’en résistance à du cléricalisme préalable, d’athéisme qu’en réponse à du théisme préalable, et de caricature d’un Pouvoir ou d’une Autorité qu’en réponse ou résistance à des abus de Pouvoir ou d’Autorité.

@Chibani : né et élevé dans une famille, un village et une société catholique très pratiquante, donc culturellement catho à vie, je n’en ai pas moins su mettre en doute mes croyances et superstitions, et finir par accéder à un athéisme serein, qui ne m’a jamais empêché, au contraire, de m’investir socialement et citoyennement, en respectant les convictions d’autrui aussi longtemps qu’elles ne venaient pas m’élever des interdits (contraception, IVG, par exemple) au nom de textes dits sacrés ou prétendre me soumettre à des pouvoirs se prétendant les interprètes d’un Dieu auquel, tout en y ayant longtemps cru avec ferveur, je ne crois plus, comme je ne crois plus à bien des légendes de mon enfance. Mon athéisme (pourtant fort tolérant et non militant) aussi pourrait trouver insupportable qu’on vienne encore le heurter avec des croyances abracadabrantesques ou des superstitions archaïques. Avec mes respects (que j’espère réciproques).

https://www.lemonde.fr/education/article/2020/10/28/hommage-en-classe-le-2-novembre-on-attend-de-l-ecole-qu-elle-garantisse-une-communion-totale-de-la-jeunesse-avec-la-nation_6057597_1473685.html

On ne peut plus ignorer que des jeunes endoctrinés ne viennent plus à l’école comme élèves pour écouter ce qu’un enseignant pourrait avoir à leur enseigner, mais comme prosélytes voire sicaires pour lui apprendre à lui toutes les soumissions qu’il devra assumer s’il veut continuer à vivre…

On sait que fut néanmoins égorgé puis décapité l’enseignant qui, par prévenance et souci de ne pas choquer, avait invité les élèves qui le souhaiteraient à ne pas regarder le dessin à partir duquel il voulait peut-être justement développer une discussion sur la notion de provocation ou d’obscénité…

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/28/didier-daeninckx-qui-aurait-pu-imaginer-que-la-gauche-se-dechirerait-a-propos-d-un-delit-imaginaire-forge-par-des-assassins_6057606_3232.html

Merci Didier, pour ta constance, ton courage, ta lucidité et ton talent littéraire (j’inviterais volontiers nos lecteurs à lire ou relire ton « Meurtres pour mémoire » où tu évoques si justement les massacres commis en octobre 61 par la police parisienne sur des Algériens participant à une manif interdite). Quiconque te connaît un peu (pour t’avoir lu), connaît ton engagement humaniste et antiraciste et comprend combien brûlante peut être aujourd’hui ta douleur devant… devant, disons, pour ne choquer personne, devant… l’innommable.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/28/rushdie-charlie-paty-victimes-d-une-meme-offensive-planetaire_6057609_3232.html

Merci, Monsieur Birnbaum, de rappeler la dimension planétaire de l’offensive islamiste en cours. Cela devrait permettre aux uns de ne pas se prendre pour le nombril du monde (fût-ce pour s’autoflageller ou se faire d’inutiles leçons entre Français) et aux autres de prendre conscience que la résistance à cette entreprise de conquête doit rapidement trouver sa dimension européenne.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/27/le-nihilisme-djihadiste-prospere-quand-se-ferment-les-systemes-politiques-des-pays-a-majorite-musulmane_6057461_3232.html

Je crains, malheureusement, que ces vaillants et respectables intervenants ne confondent un peu l’effet et la cause, l’oeuf et la poule : 

de même qu’il ne peut guère y avoir d’anticléricalisme sans cléricalisme préalable, ni de revendication athée sans que ce soit en réponse à du prosélytisme théiste, de même il ne pourrait se développer de « l’islamophobie » (un mot de propagande islamiste qu’il faut refuser malgré sa médiatisation par les ayatollahs, les Frères Musulmans ou le CCIF) sans prosélytisme islamiste préalable : pourquoi des gens développeraient-ils soudain une phobie de l’islamisme, si l’islamisme n’était pas devenu d’abord leur cauchemar ? N’avons-nous pas dû, ici, en Europe, lutter, souffrir et souvent mourir, durant des siècles pour nous libérer de l’oppression de la théocratie papiste ou luthérienne ? Pourquoi nous soumettrions-nous maintenant à une oppression théocratique exogène ?

Bien sûr qu’on n’aurait jamais, de la part de « bouffons » aussi antiracistes et anti-Autorités que ceux de Charlie Hebdo eu l’indécence de choquer des compatriotes musulmans si l’on n’avait pas d’abord estimé que la religion de ces compatriotes mêmes étaient caricaturée par les islamistes et autre barbus théocrates ayatollesques qui ne pouvaient que choquer nos compatriotes. En caricaturant des caricatures, ne rétablit-on pas simplement un peu de bon sens ?

« On voudrait déclencher une guerre, on ne s’y serait pas mieux pris. » Qui donc, depuis la République Islamique d’Iran a condamné à mort un écrivain anglais pour un roman somme toute assez naïf ? Quelle guerre donc avaient déclarée nos compatriotes écrasés à Nice, un jour de fête nationale, par un camion conduit par un « fou de Dieu » ?

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/30/la-france-face-a-la-conjonction-des-perils_6057886_3232.html

Si le confinement est “nécessaire pour tenter de freiner l’effroyable montée du nombre de malades”, ce n’est donc pas “un un aveu d’impuissance” (d’un président qu’on voudrait stigmatiser), mais la tactique adaptée à une situation. 

Se féliciter, à juste titre, que “les Français ont résisté à toute tentation de riposte violente” à la barbarie islamiste n’interdit pas qu’il est des formes de résistance auxquelles le pays pourrait, devra avoir recours de façon tout à fait légale et “démocratique” pour s’en défendre (ne serait-ce par ex. que par la mise en examen systématique de tout prêcheur de haine, qu’il le fasse du haut d’une chaire ou du bas d’un réseau d’asociaux, puis expulsion éventuelle si une mise en détention n’était pas prononcée par un juge d’instruction). 

Est-il anormal que “des dispositifs d’exception se multiplient” dans un pays qui doit faire face à la fois à une guerre que lui livre le fanatisme religieux et à une pandémie virale pour le moment irrémédiable ?

@le sceptique  : On peut, légitimement, estimer que cet édito, comme beaucoup d’éditos, est écrit pour se payer de mots ou plutôt en vendre… Et vous avez assurément raison, hélas, de penser que « l’unité nationale » si iréniquement invoquée serait vite déchirée par le premier acte d’un gouvernement tentant d’entrer en efficace résistance à la guerre barbare qui nous est menée à l’appel de certains pays ou autorités islamiques. Cela dit, les mots impactent bien souvent autant que des actes : voyez comment la notion « d’islamophobie » a durablement paralysé nombre de nos intellectuels. Voyez comme le moindre mot d’un président déclarant ‘il y aura d’autres caricatures » peut entraîner de réactions et violences téléguidées…

@Aloes : Espérons surtout nous engager dans l’efficace résistance tous azimuts (légale, sociale, éducative, médiatique, numérique, policière, militaire si nécessaire) qui nous permettra de réduire le nombre d’attentats que vous évoquez et autant que possible préventivement neutraliser ceux-là mêmes qui se disent publiquement nos ennemis (quand on se déclare un ennemi de la laïcité, quand on estime qu’une croyance particulière est supérieure à la loi commune, on est un ennemi de la commune république garante de nos libertés).

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/30/attentat-de-nice-les-catholiques-et-leurs-paroisses-cibles-recurrentes-des-djihadistes_6057906_3224.html

Bien sûr que la barbarie s’attaquera à tout symbole d’une civilisation qu’on ne pourra jamais égaler et seulement envier : presse, école, lieux de cultes de diverses religions, lieux publics mixtes de culture, de distraction ou de détente… 

Si les fanatiques hystérisés par certaines théocraties savaient en outre que la France est le pays le plus athée d’Europe, ils se déchaîneraient peut-être encore davantage, car la libre-pensée, le droit d’apostasie et d’athéisme est ce qui insupporte le plus aux théocratures et à leurs sicaires.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/31/proces-des-attentats-de-janvier-2015-les-heros-de-l-humanite-et-les-carabistouilles-des-accuses_6057991_3224.html

Même si tout cela (tant le massacre de 2015 que ce procès) se passe entre êtres humains (qu’ils soient du côté des accusés ou de leurs victimes), quiconque aura suivi les comptes rendus de ce procès, et surtout lu l’article ci-dessus, aura compris que nous assistons là (comme au moment du massacre lui-même) à un véritable choc, une confrontation, un affrontement de deux civilisations, de deux cultures totalement inconciliables.

https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/30/des-milliers-de-musulmans-protestent-contre-emmanuel-macron-au-bangladesh-au-pakistan-et-dans-les-territoires-palestiniens_6057968_3210.html

Curieux comme tout le monde sait identifier « le monde arabe » et en parler lorsqu’il s’agit d’évoquer les manifestations populaires de haine ou de violences visiblement organisées par les pouvoirs locaux… mais que lorsqu’il s’agirait que ce même “monde arabe” sache faire preuve de modération, d’appel à la paix, à la tolérance religieuse ou à la dénonciation du terrorisme islamiste, on nous explique bien vite qu’il n’y a nulle autorité reconnue pour organiser ce “monde arabe”…

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/31/jean-francois-bayart-que-le-terme-plaise-ou-non-il-y-a-bien-une-islamophobie-d-etat-en-france_6057987_3232.html

Merci de nous permettre par la publication de cette “prise de position” [ terme militaire s’il en est dans une guerre de tranchées… voire de gorge tranchée… ] de comprendre que certains iraient volontiers jusqu’à crever les yeux de qui verrait le désastre qu’aurait entraîné leur propre aveuglement.

https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/31/il-faut-cesser-le-boycott-de-la-france_6058042_3232.html

Puisse cette tribune être ouverte à tous et non aux seuls abonnés. Puisse-t-elle être traduite en arabe et proposée tous azimuts à des médias arabophones.

Car ce qui est passionnant dans cette contribution, c’est son souci de s’appuyer à la fois sur des extraits du Coran et sur des extraits de la constitution française ou d’intellectuels français (comme Alain, dont on devrait donner à lire les « Propos » plus souvent). 

C’est en faisant dialoguer des textes dits saints (d’où l’on s’efforce de tirer des leçons de bon sens partageables par tous et non seulement des vérités indiscutables affirmant la supériorité des uns) avec des textes profanes (pour voir comment ils peuvent se compléter) qu’on illustre le mieux ce que c’est que travailler dans un esprit de laïcité, à la française…

Pauvres de nous, pauvre pays… ou juste pauvre de moi ?

Depuis qu’au milieu des années 80 (du siècle dernier, déjà !) Mitterrand (avec Fabius, médiatisé sinon vendu comme « le plus jeune 1er ministre que la France aura jamais connu ») s’est résigné (suite aux leçons d’un Delors et consorts) à choisir de maintenir le franc dans le Système (ou Serpent) monétaire européen (SME) et donc à renoncer à l’assistance nationale que l’Etat aurait pu ou dû porter à l’industrie privée française (ce qui aurait impliqué de renoncer à jouer selon les règles de l’UE), en se soumettant au fonctionnement néo- sinon ultralibéral du capitalisme financier tant européen qu’international (promu à la fois par Reagan, Thatcher, FMI et OMC), il n’a plus guère été possible de proposer une réelle alternative sociale-démocrate à notre politique. Ou alors, il aurait fallu oser une toute autre politique fiscale (de justice redistributive) que celle qui aura été promue entre temps (et qui aura favorisé une explosion des inégalités, en faveur des sphères proches du Pouvoir ou de l’argent et aux dépens des moins aisés ; même si je n’ignore pas que notre système fiscal est déjà remarquablement raboteur quand on compare les inégalités avant et après impôts).

Ce n’est pas pour rien que depuis ce temps, la même politique de soumission aux règles et traités internationaux a pu continuer d’accorder grosso modo du pouvoir d’achat aux gens (grâce à l’importation de produits fabriqués par des opérateurs infiniment moins payés que les nôtres) tout en augmentant le chômage de nos travailleurs (tant leur compétitivité n’aura pu, malgré leurs qualités et notre technologie, être à la hauteur de travailleurs coûtant cinq à dix fois moins cher, surtout qu’on n’aura pas fait payer au juste prix écolo-économique les coûts des transports internationaux et diverses pollutions locales). Ainsi toute augmentation des salaires chez nous (en réduisant la compétitivité internationale de nos travailleurs) ne risquait que d’y augmenter le chômage (et finir par réduire un pouvoir d’achat que l’on croyait augmenter).

Devant le chantage exercé par la finance internationale sur un pays que son taux d’endettement soumettait d’autant plus au bon vouloir des prêteurs internationaux (et à l’éventuelle augmentation des taux d’intérêts), nous n’avons pas osé imposer les bénéfices, rentes et dividendes comme il aurait été juste de le faire par souci de redistribution sociale ou de promotion industrielle nationale (ou européenne). Nous n’avons pas osé taxer les flux financiers internationaux comme il aurait fallu, car, petit pays isolé parmi d’autres au sein d’une UE qui ne nous suivrait pas, nous n’en avions plus les moyens : sans cesse nous devions veiller à ce que des investissements ou des prêteurs étrangers daignent se porter sur notre pays, afin qu’il reste tant soit peu à flot (tout en continuant, année après année, à augmenter son déficit et/ou sa dette). Ainsi vivons-nous à crédit depuis des décennies et n’osons plus guère ni discuter de nos taux et délais avec nos créditeurs, ni expliquer à nos compatriotes qu’à vivre à crédit comme nous le faisons, nous marchons, comme certains personnages de dessins animés, au-dessus du vide sans le savoir ; malheur au premier responsable politique qui nous demanderait de regarder en bas, alors qu’il est tellement plus populaire de pointer le 1% des profiteurs là-haut…

L’ennui, c’est que ces (ir)responsables politiques semblent trouver normal, en ce qui les concerne, eux, leurs proches, leur milieu, de vivre dans les sphères lumineuses des Elysium (cf. le film de S.F.) des classes aisées où l’on s’entre-encense mutuellement entre premiers de cordée et autres winners.

Et le pire, c’est qu’en face, plus rien de politiquement organisé, de démocratiquement alternatif ne semble possible.
Les partis aussi historiques que le PS ou le RPR (avec ses changements d’étiquettes) ont accepté, ces derniers temps, pour désigner leur candidat aux présidentielles, de consulter les premiers venus pour le leur dire, renonçant ainsi à justifier l’existence même de militants assumant, dans la durée, l’intellectuel collectif d’un parti, de son programme et de son ou ses candidats. Détruisant ainsi la raison d’être d’un parti (présenter un programme et des candidats pour le soutenir) et ouvrant le champ à n’importe qui, jeune prodige, brillant communiquant ou nœud de convergence de puissants supports et courants (financiers ou médiatiques, etc.) éventuellement obscurs sinon occultes, pour devenir à la fois leur héros (derrière qui on se range) et leur héraut (dont on fait son porte-parole).

Et lorsqu’un tel personnage, jeune premier et brillant miroir aux alouettes, aura attiré les suffrages et été porté à la première place, comment lui expliquer ensuite qu’il ne serait que le fruit largement aléatoire de circonstances favorables ou manipulées et non l’être d’exception sinon le sauveur du pays qu’il pourra se croire à l’instar d’un héros d’antan (Alexandre ou Bonaparte, voire Jupiter) qui aura tout réussi du premier coup. Comment un Macron ne pourrait-il être persuadé qu’il est vraiment un génie sans bouillir et qu’il n’a pas à écouter un peuple de braillards, de paresseux ou d’incapables, lorsqu’il lui a été si facile de réussir, juste en traversant la rue qui va de Bercy à l’Elysée, comme on aura su séduire la prof tant admirée et même l’épouser au mépris de tous pronostics voire convenances ?

Entre temps, lorsqu’on ne peut plus se payer des fonctionnaires dignes de ce nom, de ce statut et de ces missions, mais qu’on préfère multiplier la sous-traitance, la contractualisation éphémère qui (de l’Education nationale, en ex-PTT, en future ex-SNCF, etc.) se répand comme Covid dans un culte d’évangélistes, bref lorsque l’ubérisation devient le seul moyen de survie dans la jungle sociale où l’on fait vivre de plus en plus de gens, il n’est pas étonnant que de plus en plus de gens tantôt excipent de leur (médiatiquement) aussi pathétique qu’enviable statut de « victime » tantôt manifestent ce qu’ils estiment être leur « légitime et compréhensible (sinon jaune) colère ».

Pour autant, peut-on applaudir un peuple ou des mouvements politiques se contentant d’affirmer que tout est de la faute à Macron (à Hollande, à Sarkozy, etc.), au Pouvoir, à Ceux-d’en-haut, au Kapital, aux Exploiteurs, aux Banksters, quand ce n’est pas aux immigrés ou aux juifs… Et que « l’argent, y a qu’à le prendre là où il est » ou qu’à relancer la croissance par la distribution d’un pouvoir d’achat supplémentaire dont bénéficierait le bon peuple qui le mérite bien.

Du coup, entre ceux qui caricatureraient le Haut (caricaturer n’est pas mentir, me rappellera-t-on, mais juste exagérer la vérité, donc néanmoins ne plus la dire, estimerais-je) et ceux qui (comme je viens de le faire) caricatureraient le Bas, où resterait-il de la place pour un débat politique sérieux ou utile entre citoyens adulte et responsables ?

On peut estimer que Macron se réduit à présider « un gouvernement d’oligarques, de riches, de banquiers au service des riches et des puissants » (comme je l’écris sur une page précédente de mon blog) et s’indigner en outre qu’il le fasse en exprimant tout son mépris pour les gens ; on peut lui reprocher à la fois ses actions (réformes de régression sociale) et ses inactions (manque de préparation matérielle anti-Covid), et cependant, ou en même temps, savoir que c’est tout un système médiatico-politico-social qui contribue à infantiliser les gens, en entraînant régression culturelle et intellectuelle patente, système médiatique contre lequel nul contre-pouvoir culturel, politique ou intellectuel populaire (et donc en prise sur les gens) n’a su s’organiser (quand il ne s’est pas totalement autodétruit comme l’a fait ces derniers temps la gauche social-démocrate).

Bref, nous assistons à une déroute, mais face à l’impéritie (sinon la perversion ou la méchanceté) du Pouvoir, nous nous sommes nous-mêmes tellement éparpillés et démunis que nous ne trouvons, paradoxalement, faute de savoir nous organiser collectivement nous-mêmes, qu’à en appeler encore à Jupiter, tout en lui mordant la main qu’on lui demande de nous tendre maintenant, en lui reprochant de s’en être servi hier pour nous faire les poches…

En fait, il me serait d’autant plus facile de faire le mérité procès de Macron (et d’autres avant lui) que je saurais qu’en face je peux me raccrocher à mieux : pendant des décennies, il m’a été tout à fait aisé (voire jubilatoire à l’occasion entre potes ou « camarades ») de faire le procès des pouvoirs successifs dont on pouvait d’autant mieux critiquer la politique que nous étions sûrs d’avoir une alternative crédible à proposer. Hélas, maintenant la seule alternative politique qui se présente pour remplacer et prétendre faire mieux que l’espèce de trouble cloud que constitue LREM, c’est soit un confus bouillonnement d’Insoumis ou autres radicaux libres plus ou moins verts soit l’imposture Lepéniste. Et face à cela, à ceux-là, à ça, Macron et ses soutiens (du centre gauche au centre droit voire à droite), malgré les légitimes reproches qu’ils méritent à mes yeux, me semblent encore les moins pires. Et je me désespère à la fois de ne pas savoir mieux les mépriser ou les fustiger ni de trouver où m’illusionner sur de meilleurs choix…

J’ai des connaissances (qui furent naguère plutôt des amis, mais avec lesquels s’est tendue une distanciation sociale antérieure à la prévention nécessaire face à la Covid-19) qui dans leur admiration militante pour Mélenchon, Ruffin et consorts ont gardé une niaque et une énergie échevelée dont s’alimente ardemment la haine que leur inspirent Macron et le Système. Et je ne sais si je désespère plus d’eux que de moi… Je ne sais quel homme ou femme politique pourrait me proposer, actuellement, une alternative crédible et mobilisatrice à Macron et à sa de moins en moins triomphale et mobilisatrice En Marche (arrière ?).

Je ne sais qui je déteste le plus, Macron ou ses opposants. Si : ses opposants. Et, en fait, plus je les vois ou les entends s’époumoner pour dire tout le mal qu’ils pensent de Macron, moins j’ai envie de les écouter, me résignant de fait à devoir trouver bien des circonstances atténuantes à ce si méprisable et presque pathétique Macron. Et de cela je désespère, autant de moi que de mon pays.

Créon, Macron, même rime, mêmes raisons ? Même tragédie ?

Je souhaite ici reproduire un commentaire que j’ai proposé sur un blog politique que je consulte souvent, et dont, même sans en partager l’idéologie, je vous recommande la lecture, puisque son auteur y accepte tout commentaire même celui dont il ne partage pas non plus l’idéologie. On y accédera via [ descartes-blog.fr ] dont la dernière contribution (du 30 avril) propose une réflexion sur le tragique (actuel) en politique, en s’inspirant du Créon tel qu’Anouilh le fait parler dans son Antigone. Voici le commentaire que j’y ai proposé. Qui voudra le lire dans son contexte se reportera au blog signalé ci-dessus :

Dans une (bonne) tragédie, tous les protagonistes ont tort d’avoir raison (et réciproquement).

En principe, la science n’énonce que des hypothèses tenues pour vraies en attendant leur éventuel démenti (ce qui n’empêche pas que des application technologiques adoptées au vu de cette science puissent entraîner des résultats parfois tragiques dont la science en question n’aura pas voulu intégrer toutes les éventuelles conséquences), alors que la politique, elle, exige des décisions souvent à prendre au jour le jour en fonction de l’évolution du pays ou du monde, décisions que l’on appuie sur ce qu’on affirme être la vérité ou le bien du pays : même un gouvernement fort légitime et populaire (ce qui n’est pas le cas de notre actuel gouvernement Macron, ni des nombreux précédents, nous rappellera-t-on) pourra être conspué suite à des décisions prises par ses gouvernants (en fonction de leur savoir, de leur connaissance des réalités) mais contestées par le peuple (en fonction de son ignorance, sinon du haut de son ignorance, lorsqu’on se persuaderait que vox populi vox dei).

Le scientifique comme le politique pense pourtant disposer d’informations (qui même éventuellement incomplètes) lui paraîtront suffisantes pour lui permettre d’émettre ses hypothèses, exposer sa science ou décider de ses mesures ou décrets. L’ennui, c’est que le peuple, si vulgum pecus fût-il, est persuadé lui aussi de ses savoirs (« Tout le monde sait bien que… ») et au nom de cette science infuse voire confuse, il peut lui paraître évident que les “autorités” (qu’elles soient scientifique, médicale ou politique) font les mauvais choix.

En outre, comme les médias, condamnés à informer sur de l’inhabituel ou du catastrophique (un train qui arrive à l’heure, ce n’est pas une nouvelle ni donc une info), ne pointent le plus souvent que ce qui ne va pas, il est normal que le bon peuple ne soit informé que de ce qui ne va pas, et finisse, fatalement, de plus en plus “en colère” ou revête un GJ pour bien se faire voir (tout en expliquant que c’est au gouvernement d’aller se faire voir :-). Ce n’est pas malveillance de la part des médias. Même si leur obstination systématique dans le pointage de ce qui ne va pas finit forcément par paver les chemins d’un enfer de chienlit avec les meilleures intentions informatives. Cependant, le même système médiatique étant plus ou moins à l’oeuvre partout dans le monde, il n’explique donc pas pourquoi notre pays serait à la fois si bouffi d’orgueil national que pétri de térébrants doutes existentiels.

On nous dira qu’au pays de Descartes, où l’on se flatte de savoir douter de tout, mais où l’on confond aisément esprit critique et esprit de critique, il est fatal qu’on se persuade qu’il n’est de bonne science qui ne critique ce qu’on lui demande de croire, ni de bonne politique qui ne conteste les autorités qui prétendraient faire autorité parce qu’autorités, etc.

Ce qui est tragique dans la situation de la France, c’est que sondages internationaux après analyses internationales signalent que c’est dans notre pays qu’on se méfie le plus de soi-même, des autres, des médicaments (même si on en consomme plus qu’ailleurs), de ses élus (même si on les a soi-même fort démocratiquement élus), etc. Et actuellement, notre gouvernement sait qu’il est un des plus fragiles des gouvernements d’Europe, le moins bien élu, dit-on (Macron aura été moins élu que Marine Le Pen rejetée, etc.), et quoique parfaitement légal, il passe pour des plus illégitimes aux yeux de son opposition voire de certains de ses soutiens politiques, financiers ou médiatiques.

Entre temps, nous sommes entrés dans un système socio-culturel où la victime est devenue le héros des temps modernes, où le premier à savoir se dire davantage victime que son voisin prétend acquérir sur lui des droits supérieurs à la médiatisation voire à quelque compensation financière, etc. Et dans ce système (droit-de-l’hommiste, diront certains), chacun sait pouvoir compter sur tout un quasi cursus honorum de juridictions diverses devant lesquelles savoir se poser en victime et donc accuser quelque coupable, avec des possibilités d’appel et de plaintes quasi interminables, en partant d’un tribunal local jusqu’à quelque institution européenne ou internationale devant laquelle se plaindre et accuser. Au point que l’on finirait par penser que la France est devenue le pays des quérulents processifs
https://justice.ooreka.fr/astuce/voir/553917/querulent-processif )

Et pourtant, de même que l’on peut se complaire à savoir se plaindre et le plus souvent donc à pouvoir accuser autrui, l’administration, les “autorités”, sinon le Ciel, on aime être de ceux qui partagent ce qu’on dit être l’opinion publique : on aime être du côté des plus nombreux, de ceux qui donc théoriquement ont raison, puisque partageant le même bon sens commun.

Ne nous étonnons donc pas non plus que les jugements (dans un sens ou l’autre) de l’opinion publique (pas seulement en France, certes, mais en France plus qu’ailleurs) puissent varier au fil des émotions du jour et que le Capitole soit plus proche que jamais de la roche Tarpéienne laquelle, au moment même où l’on en serait jeté, peut devenir le tremplin de votre future gloire parce que vous aurez été une brillante victime (voir, par exemple, le retour en gloire d’une ancienne ministre de la santé comme madame Bachelot accusée naguère d’avoir dilapidé l’argent public par ses stocks de vaccins ou de masques et célébrée maintenant comme un exemple de prévention. Voir aussi la conjonction récente du destin médical et médiatico-politique de Boris Johnson qui, sur le point d’être critiqué pour son imprévoyance confineuse, est victime de l’épidémie contre laquelle il n’aura pas été assez prévoyant, mais, malade, puis guéri de la maladie qu’il aura par son imprévoyance contractée lui-même, devient une icône nationale de résistance à la maladie).

Mais à la différence du Créon d’Anouilh, autocrate qui sait comment manipuler par mensonge, terreur et propagande les “brutes que je gouverne” (sic), notre gouvernement ne saurait prendre la moindre mesure (voire y renoncer après une virulente opposition populaire ou politique) sans être critiqué, moins pour ce qu’il fait (ou ne fait pas) que pour ce qu’il passe pour être, pour ce qu’on l’accuse d’être : un gouvernement d’oligarques, de riches, de banquiers au service des riches et des puissants. Ainsi, en notre pays, la critique politique est devenue existentielle, essentialiste : le gouvernement n’est plus critiqué pour ses (in)actions mais, quoi qu’il fasse ou ne fasse pas, sur sa seule et simple existence.

Et en ce sens, notre pays n’est plus un pays gouvernable, tant il est devenu un pays d’émotions médiatiques, de populisme d’irresponsables, d’infantilisés, peuple d’enfants qui se racontent des histoires d’ogres et de méchants.

Et notre tragédie est sans doute là : “Malheur au pays dont le Peuple-Prince est un enfant”.

Documents anciens, sinon datés : Faire de la politique avec RAGE

Cette période de confinement m’a permis d’effectuer diverses toilettes de mon disque dur et donc d’exhumer certaines archives, devenues historiques (en tout cas pour ma propre histoire) mais traitant néanmoins de problèmes politiques toujours d’actualité. C’est pourquoi je les remets ici en lumière, afin qu’un éventuel lecteur puisse en éclairer sa propre réflexion.

Refaire de la politique avec RAGE [ Rassemblement A Gauche Ensemble ]

[ Réflexion diffusée à mes camarades de gauche en mai 2002, après le choc politique que constitua, le 21 avril 2002, l’élimination du candidat de gauche dès le premier tour des élections présidentielles…]

Face à la dispersion actuelle, de plus en plus frénétique, des partis et mouvements de gauche, (et dont nous connaissons les conséquences aux dernières élections municipales, présidentielles et législatives), il me semble que s’impose une recomposition politique par le dépassement des actuels partis de gauche  à partir d’une plate-forme claire et cohérente. Recomposition qui pourrait se faire à partir de l’aile gauche du PS, de l’essentiel du MDC et du PRG, de l’essentiel des VERTS, de l’essentiel des militants du PC, de beaucoup de militants de l’extrême gauche, voire de beaucoup de sympathisants des mouvances anarcho-libertaires.

Cela supposerait (quelques suggestions à titre d’exemple) de :

– Dénoncer la soumission (au moins tacite sinon revendiquée) d’une petite majorité du PS à l’hégémonie du néo-libéralisme. Certains, comme DSK ou Fabius, pour ne citer que les plus médiatisées des personnalités de ce courant, pourraient très bien voir leurs idées appliquées par l’UDF voire DL.

– Dénoncer un certain libéralisme libertaire des Verts (qui, pour ne donner qu’un tout petit exemple, promeuvent la légalisation et la consommation de drogue sans dénoncer les conditions socio-économiques et culturelles qui peuvent entraîner l’usage de drogues. Cela dit, les maffias induites par l’illégalité des circuits de distribution de la drogue seraient supprimées par la légalisation des drogues dites douces).

– Dénoncer, au PC notamment, mais pas que chez lui, l’illusion que la solution aux problèmes socio-économiques ne pourrait se trouver que dans la « Croissance »  : La notion de croissance du PIB, par exemple, tel qu’il est calculé actuellement n’a aucun sens si l’on veut prendre en compte les vraies dimensions de la poursuite de l’aventure humaine sur la planète Terre. Rappelons, pour en démontrer l’absurdité, que chaque accident routier entraîne une augmentation du PIB : production de nouvelles bagnoles, fourniture de services divers : garages, avocats, experts, etc. 

– Dénoncer chez l’extrême gauche (et plus largement dans le courant anarcho-libertaire) le mythe de la « lutte finale », du « front social révolutionnaire », de l’anti-fascisme de rue, etc. Cela suppose qu’on comprenne enfin qu’en démocratie la politique ne se décide pas dans les rues où quelque avant-garde (qui aurait « tout compris ») entraînerait le peuple ignare vers des lendemains qui chantent. L’histoire nous a appris où mènent de tels romantismes : jamais un mouvement mené derrière le drapeau rouge n’a entraîné un changement positif à moyen ou long terme pour les peuples rangés (par la force ou la propagande) derrière lui. Et si ce drapeau est rouge du sang des victimes de la contre-révolution, du fascisme, du nazisme ou du capitalisme, il l’est tout autant de tous ceux, héros ou victimes, tombés au cours des luttes mystifiantes, et souvent fratricides, menées sous sa hampe.

– Ne plus reconduire des « alternances » gauche-droite qui se limitent à une quasi soumission à l’hégémonie néo-libérale en cours. Le citoyen ne doit plus se voir proposer une alternance, mais une alternative (nous reviendrons sur cette notion). Ce sont bien de telles alternances poursuivant en gros la même politique qui ont découragé (abstention) ou enragé (extrémisme) des électeurs.

En démocratie, notamment dans la démocratie représentative dans laquelle nous fonctionnons pour le moment (à défaut de celle de l’Aréopage athénien d’il y a 25 siècles ou de l’imminente démocratie directe que rendrait possible le recours aux moyens actuels de la communication informatisée), les choix sont faits dans les urnes par un citoyen, si possible digne de ce nom, c’est-à-dire, réellement éduqué et informé des alternatives possibles et des conséquences découlant des choix qu’il est appelé à faire.

Il faudrait expliquer qu’en politique, comme ailleurs, la notion de choix effectif implique une seule alternative réelle et pas un nombre quasi infini d’options entre lesquelles certains ne pourraient qu’hésiter voire s’abstenir tant serait grande la prolifération des partis, candidats, etc. Pour prendre une image, disons qu’avant d’inviter les citoyens à se disperser pour remplir leurs caddies dans les divers rayons d’une espèce de supermarché de la gauche, il faudrait d’abord vérifier que ce marché existe, et si nécessaire, le construire préalablement, en alternative aux solutions prônées par la droite.

[Cela ne signifie d’ailleurs pas que toute solution prônée par la droite serait , parce que de droite, obligatoirement mauvaise ou à diaboliser. Sinon nous ne serions plus en politique mais en religion : la politique est justement l’art de permettre l’expression d’un désaccord ou d’un conflit mais aussi de le conclure (au moins provisoirement) par un vote démocratique. Ce n’est qu’en religion qu’on réfère à des vérités révélées ou préétablies par quelque Puissance extérieure au débat démocratique. ]

Si l’on veut faire venir ou revenir les citoyens à la politique, il faut qu’on leur propose une seule réelle alternative démocratique, en l’occurrence, gauche ou droite.

J’exclus volontairement, en démocratie, l’option révolutionnaire qui ferait dépendre le changement politique d’un rapport de forces physiques (éventuellement armé), option dont nous connaissons les échecs réitérés ou les avatars monstrueux. De même que j’exclus la contre-révolution prônant le retour mythique à une organisation sociale antérieure à la démocratie.

Autrement dit, avant de proposer aux électeurs de gauche, d’aller chercher qui au centre-gauche-droite, qui au centre-gauche, qui à gauche socialo-démocratique, qui à gauche démocrate-chrétienne, qui à gauche Verte, qui à gauche trotskiste, néo-trotskiste ou néo-maoïste, il faudrait d’abord qu’on en revienne au fondement même du Pacte républicain censé inscrire le destin individuel dans un destin collectif construit à partir d’une Volonté générale et d’une loi faite par tous et donc respectée par tous (puisque chacun aura contribué à l’établir).

Certes, je sais que ces notions, élémentaires, sont aussi idéales ; en effet, lorsqu’au lendemain de la Révolution se constituèrent des Montagne et des Marais, des Factions et des Comités de Salut Public, la Volonté générale (mais seulement provisoirement majoritaire) porteuse de la Loi, fut bien vite contestée comme telle par diverses minorités. Pour en sortir, il fallut bien convenir d’une espère de Loi supérieure aux lois provisoires. D’où les notions de lois constitutionnelles ou mieux encore de Droits inaliénables de l’être humain, face auxquels aucune loi ne pourrait faire loi…

De nos jours, lorsque une Chambre de telle couleur politique (de droite ou de gauche) vote des lois, et même après que tel Conseil Constitutionnel les aura déclarées conformes à la Constitution, ces dernières ne sont-elles pas parfois (à juste titre, à en croire les opposants) contestées, soit par les pouvoirs économiques ou syndicaux, soit encore par l’opinion publique ou la « rue » ?  Mais où serait alors le Droit si le Droit n’avait en sa faveur qu’une majorité parlementaire contestée et non les médias, l’opinion publique, le peuple ou la rue, voire le sens de l’histoire (tels que certains croient le savoir ou savent le faire croire) ? Dans un pays où la Représentation Nationale ne serait plus, à en croire certains,  que l’expression d’une classe, d’une caste, d’une bourgeoisie ou d’un prolétariat, au nom de quoi encore se ferait la loi ? Au nom du sens de l’Histoire ? De Dieu ? Du Marché ? Des plus Forts ? Des plus bruyants ?

Et qui fait l’opinion ? Qui informe le peuple ? Qui soulève la rue ?  Quel est la responsabilité des médias ? Et quelle loi ces derniers suivent-ils ? Celle du marché (cours de la Bourse, audimat, lobbies, etc.) ou celle d’un impératif moral ou civique ? Qui informe qui ? Et qui sait mieux qu’autrui ce qui est bon pour le bien commun de la Nation ou de l’Humanité ? Nuances que les « Lumières » du XVIIIe siècle n’avaient guère éclairées. Et que des idéologues du XIXe ou du XXe ont parfois hardiment négligées… Que cette question ne cesse de préoccuper sociologues et philosophes, voire citoyen lambda de mon genre, signifie au moins qu’elle ne peut plus être éludée. Un bon début pourrait être que chacun se dise qu’il n’a pas forcément raison de penser ce qu’il pense simplement parce qu’il le pense ! Vaste sujet, qu’en toute modestie je ne prétends pas circonscrire ici.

Toujours est-il que, comme en démocratie représentative il n’existe pas d’autre moyen de se donner une loi commune que de la faire voter par des représentants élus, tout mouvement qui refuserait de participer à ces élections se mettrait ipso facto en dehors du cadre démocratique. Mais également tout mouvement qui voudrait faire abolir par la rue une décision prise par des représentants démocratiquement élus. En effet, en démocratie, si le droit de manifestation est un des aspects du libre droit d’expression, le recours à la force physique (camionneurs bloquant les rues, grévistes bloquant l’accès à l’usine, manifestants empêchant la tenue d’un sommet international réunissant des représentants démocratiquement élus, etc.) n’est pas une pratique digne de démocrates.

[Lorsque nous en serons parvenus à la démocratie directe informatisée, qui je le répète pourrait être imminente, les choses changeront et chacun contribuera directement par son vote à  la décision prise à la majorité. Mais même cela n’empêcherait pas qu’une minorité veuille ensuite dénoncer les résultats du vote, mettant alors en cause la notion même de pacte démocratique] 

On sait qu’une minorité ne se permet de contester une décision prise par des représentants démocratiquement élus qu’en se réclamant de droits supérieurs à ceux de la démocratie parlementaire [droits de Dieu pour certains, droits de l’Homme pour d’autres, droits du Prolétariat, etc. ou encore droits ancestraux de l’hospitalité (comme cela fut fait, à juste titre me semble-t-il, lorsque les lois Pasqua-Debré créèrent quasiment ex nihilo des Sans-papiers)]. Mais le combat d’Antigone [agissant au nom de lois « supérieures », notamment religieuses] contre Créon [agissant au nom des lois de la Cité] n’est pas sans ambiguïté. Comme n’est pas sans ambiguïté le combat de tous ceux qui prétendent, contre la volonté de la majorité élue, agir au nom du Sens de l’Histoire, d’une classe, d’une race, d’une avant-garde ou d’une arrière-garde. Une démocratie fonctionnant à une majorité acquise à 50% des voix + une n’est sans doute pas la meilleure : des lois ou des majorités qui ne seraient proclamées qu’à partir de 75% des voix des participants seraient peut-être plus représentatives d’une Volonté générale.

En attendant, dans toute élection où ne peuvent in fine rester que deux candidats, c’est-à-dire une alternative, au lieu d’inviter les gens à se disperser (et parfois à s’abstenir tant ils sont désespérés de cette dispersion), il faut promouvoir un système politique où les deux candidats finalistes présentent effectivement une alternative claire aux citoyens. Et pour le moment, cette alternative se réduit, qu’on le veuille ou non, à l’opposition gauche – droite. A moins qu’elle ne se réduise bientôt, ce qui est à craindre si nous n’y changeons rien, à l’alternative droite – extrême droite…

Si l’actuelle extrême gauche prétendait être la seule à porter cette alternative de gauche, elle exclurait ipso facto les 8/10e  de l’électorat actuel de gauche… Dans cette perspective, on peut imaginer qu’avant que l’extrême gauche (qui ne serait plus alors « extrême » mais tout bonnement 100% de gauche) ne parvienne démocratiquement au pouvoir, il y aura encore de nombreux lendemains désenchantés…

Si une gauche clairement alternative au néo-libéralisme,

– soucieuse de préserver l’équilibre écologique sans lequel de toute façon rien ne sera longtemps possible,

– soucieuse de justice sociale et donc de répartition équitable des richesses collectives produites,

– soucieuse d’égalité (non seulement des chances, comme dans un casino, mais dans les faits) en même temps que de liberté individuelle (dans les limites où cette liberté individuelle ne serait pas antinomique aux potentialités même de l’égalité),

– inspiratrice d’une fraternité humaine transcendant les différences d’origine, de culture, de religion……

si une telle gauche est concevable, même par un citoyen lambda de ma nature, il n’y a aucune raison que nous continuions de nous la déchirer en multiples courants, partis, mouvements, ligues, luttes, etc. Ceux qui s’y obstineraient porteraient une responsabilité que les citoyens leur feraient tôt ou tard payer par leurs votes ou leur abstention.

Aucune raison, sinon le poids des traditions, de pseudo-analyses historiques, des attachements et intérêts partisans, des intérêts personnels de carrière, des certitudes bien ancrées, des psychorigidités individuelles, etc. sans parler sans doute de nombreuses autres encore…ne s’opposent à une telle refondation. Mais je suis bien conscient, que l’une dans l’autre, cela en fait tellement qu’on n’est certainement pas près d’y arriver ! [Et je suis donc bien conscient de la vanité de ma démarche, n’en doutez pas ! D’ailleurs, rassurez-vous, je ne m’y obstinerai pas … du moins pas tout seul !]

Une telle Refondation A Gauche Ensemble (RAGE) supposerait bien sûr :

– De promouvoir clairement la nécessaire prise en compte mondiale (donc la mondialisation ou l’internationalisation) des problèmes humains, culturels, économiques et écologiques créés par la folle mondialisation financière en cours. Evidemment cette volonté d’action au niveau mondial n’empêche nullement qu’elle s’inscrive simultanément voire prioritairement (penser global, agir local, subsidiarité, etc.) dans des cercles allant du plus proche au plus lointain : Arrondissement, Région, Etat, Europe, Monde.

– De répondre aux défis politiques, culturels, économiques, sociaux, humains et écologiques que pose cette mondialisation de fait (échanges, services, commerce, concurrences, information, migrations, etc.),  mondialisation à ne pas confondre avec la mondialisation financière que domine le fric, et que seule pourrait vaincre une organisation mondiale au niveau des Nations Unies (dont il faudrait revoir la représentation démocratique des peuples et nations), et, à défaut, au niveau de l’Union européenne, pour commencer.

Je ne pense plus qu’un mouvement comme ATTAC (quelles que soient les prises de conscience qu’il a permises) puisse constituer une réponse suffisante (mais l’a-t-il jamais prétendu ?) à une telle mobilisation contre la mondialisation financière. En effet, saisi d’une névrose d’urgence, ce mouvement est en train de s’éclater dans toutes les directions, notamment dans une course stérile aux manifestations systématiques prétendant paralyser la tenue de sommets internationaux, sommets internationaux qu’il faudrait non vouloir interdire par la mobilisation de « rue » mais, au contraire, rendre de plus en plus démocratiques dans leur organisation même. La pratique de contre-sommets (comme celui de Porto Alegre) me semblerait bien plus pertinente pour faire avancer l’information et la réflexion citoyenne du monde.

30 mai 2002
C.S.

P.S. j’ai choisi de ne pas préciser entre parenthèses, comme on le fait parfois, que tous les mots comme citoyen, électeur, ouvrier, etc. sont à la fois masculin et féminin. Je les laisse au neutre (ce qui dans le français actuel s’exprime par du masculin).  De toute façon, préciser du féminin par un appendice entre parenthèses me semble réducteur aussi…

P.P.S [ Pour ceux qui souhaiteraient savoir d’où je parle, pour pouvoir situer mon discours :  Enseignant depuis plus de 30 ans, je suis syndiqué (SGEN puis SNES), je suis abonné au Monde Diplomatique, à Charlie Hebdo, à Alternative Libertaire, à A Contre Courant, à La Grande Relève (mensuel prônant une économie distributive), je milite activement au MRAP depuis 1997, j’ai adhéré à ATTAC dès 1998. Et, quoique adhérent aux Verts depuis 1999, j’ai voté pour Besancenot (LCR) au 1er tour des présidentielles de 2002,  notamment à cause de l’irrévocable candidature de Mamère après son tout aussi irrévocable refus de la veille. Mais depuis que j’ai été condamné à voter Chirac à cause de l’élimination dès le 1er tour d’un candidat beaucoup plus intègre que lui, je me suis juré de ne plus voter à l’extrême gauche avant d’être assuré d’avoir fixé dans le pays ou la région un pôle cohérent de gauche, pour ne plus jamais avoir à choisir entre la droite et l’extrême droite. C’est pour moi une des leçons essentielles que j’ai tirées de ces élections.]

Documents anciens : Lettre à José Bové, incarcéré en 2003

Cette période de confinement m’a permis d’effectuer diverses toilettes de mon disque dur et donc d’exhumer certaines archives, devenues historiques (en tout cas pour ma propre histoire) mais traitant néanmoins de problèmes politiques toujours d’actualité. C’est pourquoi je les remets ici en lumière, afin qu’un éventuel lecteur puisse en éclairer sa propre réflexion.

Neuwiller-les-Saverne, 21 juin 2003

Monsieur Bové,
José,

L’été dernier, passant dans le causse du Larzac, j’ai pensé à toi (à vous tous qui avez dans les années 70 su résister au projet d’agrandissement du camp militaire du coin et avez, depuis, mené bien d’autres combats) ; j’ai compris, en voyant le pays (si peu sage ou si sauvage) dans lequel vous viviez, ce que vous pouviez aussi être. J’ai compris la force, l’énergie qui pouvait irradier de ces lieux, le sentiment « d’en être » pour ceux qui en étaient ; et j’imagine bien que vous avez dû (ou pu) développer en vous le sentiment « qu’il y a des choses qui ne se font pas » et que même si les autres ne comprenaient pas tout ce que vous aviez compris, ce n’était pas la peine de vouloir trop leur expliquer (non que vous n’ayez pas tenté d’expliquer, mais qu’à la longue, entendu ou non, il fallait se bouger), parce qu’il y a des choses qui se vivent, et d’autres qui se refusent. Un point, c’est tout.

Je savais déjà, alors, quel avait été ton engagement, ta participation parmi d’autres à diverses actions destinées à protester, dénoncer, informer, empêcher l’inadmissible. Je savais aussi quelle avait été la médiatisation forcenée (assumée, supportée ou recherchée) qui fut la tienne ou dont on te chargea.

J’ai vu des images (à la télé) du démontage du Mc Do, du fauchage de tel champ de colza, j’ai vu ta fougue, ta « présence », d’autant que les images diffusées ne semblaient (parfois) voir/montrer que toi. Or je sais que tu ne fus pas seul. Je sais que c’est au nom d’un combat collectif, porté au nom du bien collectif (estimé tel par vous) que tu/vous avez agi. Tout le monde devrait le savoir, même les journalistes qui posèrent ton image en avant de celle d’autres, même les juges qui t’ont condamné, même les copains militants qui personnalisent leur/notre combat en te mettant en avant, et qui aujourd’hui crient ton nom, appellent à ta libération, parce que c’est toi qui es en prison, parce que les martyrs, c’est « bon pour le moral » ou utile pour le combat.

Comment peut-on vivre ce vertige d’être devenu une icône ? A quel point sais-tu combien tout cela est à la fois vrai et faux, juste et pervers ?

Est-ce ta/notre faute si les médias ne peuvent vivre, vendre qu’en mettant en image des coups, des scoops, qu’en mettant en relief des icônes, des meneurs, des responsables (qui, au sens propre, auront à répondre ensuitede l’image qu’on aura fabriquée d’eux) ?

Il y a, à ce sujet, beaucoup de questions que je me pose et que tu t’es sans doute déjà posées (même si ni toi ni moi n’y avons forcément réponse… encore que l’on puisse être amené -de fait- à répondre… sans avoir forcément ni vraiment réponse).

[Mais je ne veux pas oublier que tu risques –si tu n’as pas été gracié avant- de découvrir ce courrier parmi des milliers d’autres dans une cellule du bloc A de ce bâtiment qui, si je ne me trompe, navigue dans les horizons fumeux de la Camargue marécageuse et poudreuse, et où, désert intime et centre d’un vaste mouvement social, je ne sais même pas si tu peux fumer ta fameuse pipe.]

La légalité. L’héroïne de Sophocle, Antigone, avant toi et beaucoup d’autres, estima que face à la légalité inhumaine du dictateur Créon, elle devait poser sa légitimité et celle de ses actes, fussent-ils condamnables aux yeux de la « légalité » du tyran.

Elle s’opposait à une tyrannie. Toi/nous nous mobilisons au sein d’une démocratie (fût-elle formelle seulement ou bien imparfaite) et dans le cadre de lois que, par nos représentants, nous avons contribué à faire voter. Y avons-nous le droit d’agir (au nom d’un principe de précaution, d’un jeu complexe d’une manipulation manipulée/manipulatrice des médias ou d’une personnalisation icônique d’un combat) contre nos lois (quelle que soit par ailleurs leur imperfection)  ?

Je sais bien que nous avons raison, du moins pensons avoir raison. Mais avons-nous pour autant le droit de prendre le droit d’aller contre la loi, contre la légalité sans laquelle nous serions encore plus mal en point ensemble ? Je sais bien qu’une loi n’est qu’une étape sur le long chemin de l’humanité à laquelle nous aspirons, et que, souvent, seules des actions déterminées et des prises de risques peuvent modifier des rapports de force, permettre des prises de conscience et donc des modifications de la loi.

Pour autant, José, sais-tu bien, dans ce combat, quelle est la part que tu assumes et celle qu’on te fait porter ? Es-tu intimement persuadé qu’il n’y avait pas d’autre manière (collective) d’interpeller, d’agir ? Faut-il que dans tout combat il y ait fatalement des personnalités émergeantes, « pointées »,  des meneurs (qu’on pourra ensuite, ici, héliporter à grand renfort de gendarmes et de moyens ; là, en d’autres temps heureusement, fusiller) ?

Cette notion de meneur, te semble-t-elle fatale à tout mouvement collectif ? As-tu le sentiment que tu as cherché ce rôle ou cette fonction, qu’elle t’a été imposée (et que tu l’auras seulement acceptée) par les uns (médias) ou les autres (copains militants) ? T’es-tu dit que puisqu’il en faut, des têtes à montrer (et ensuite symboliquement à couper ou à mettre à l’ombre), il fallait que tu y mettes la tienne ?

As-tu le sentiment de t’être, volontairement/consciemment, sacrifié à une cause, ou d’avoir été (malgré toi) happé dans les leurres médiatiques qui ont besoin de leurs papillons à brûler ou dans les stratégies militantes qui ont besoin de martyrs à brandir pour d’autant mieux mobiliser ?

Je m’adresse ici à l’homme, assis dans sa cellule du bloc A 07, dont la pipe peut-être est éteinte ou confisquée, auquel manquent le causse, ses arômes et ses lumières. A l’homme qui pense qu’il ne donne tout son sens à sa vie qu’en l’offrant à ce combat qui le dépasse, qui sait qu’il faut des figures de proue à toute hardie navigation. A  l’homme qui peut se demander : pourquoi moi ? Est-ce ma pipe ou mes moustaches, est-ce ma fonction syndicale qui m’ont mené là ? Pourquoi ai-je (a-t-on) estimé qu’il fallait que j’en passe par là ?

Dans quelle histoire transcendante inscris-tu ton singulier (et notre collectif) combat ?

Pourquoi l’histoire ne pourrait-elle avancer que par celles et ceux qui braveraient les lois collectives ? Pourquoi, dans notre démocratie (si formelle ou bourgeoise, c’est-à-dire soumise au fric, soit-elle. Mais y a-t-il sur terre un seul pays qui ne le soit pas ?), ne trouverions-nous pas d’autres manières d’agir, d’informer, de convaincre que celles qui conviennent aux médias et à l’image qu’ils peuvent/veulent en donner, médias qui recherchent l’esclandre, le scoop, le train qui déraille ou qui ne vient pas à l’heure, le militant qui se met en avant ou qui, pour se mettre en avant et mettre son combat en lumière, a besoin, au sens propre, de dépasser les bornes (comme je t’ai vu faire aussi à la télé, quand tu franchis, à Paris, je ne sais plus quelles barricades) ?

Pourquoi sommes-nous si nombreux (mais néanmoins minoritaires) à estimer, presque naturellement (mais je pense plutôt culturellement) qu’une action n’a de portée réelle que si elle échauffe les objectifs (des caméras) ou bouscule les moutonnements informes des tièdes ?

Pourquoi ne savons-nous pas trouver d’autres formes d’action, de mobilisation, d’information que celles qui nous tombent presque naturellement/culturellement sous la main, le mégaphone, la manif, etc. ? Pourquoi ne savons-nous pas inventer autre chose que ce que les médias attendent que nous leur produisions ?  Pourquoi nous contentons-nous, presque rituellement, des formes anciennes de mobilisation ou actions auxquelles les médias sont maintenant habitués au point de les attendre, voire de les fabriquer ? Pourquoi ne savons-nous échapper au piège de l’image ou de la fameuse focalisation journalistique (le détail qui révèle en même temps qu’il réduit) ? Comment médiatiser des combats sans tomber dans les réductions (personnalisation, image-choc, etc.) sans lesquelles les médias ne sauraient plus communiquer, ou prétendent ne plus savoir communiquer ?

 Je sais que des Bourdieu et d’autres ont analysé cette perversion, sans que les collectifs et syndicats aient encore trouvé de réponse.

Puisque te voilà condamné à lire, penser et vivre, pour l’essentiel assis dans ta cellule, pourrais-tu tenter d’en profiter pour me/nous aider à sortir de ce dilemme : comment ensemble mobiliser, informer, mener un combat politique minoritaire sans donner prise aux « forces de l’ordre », juges, et autres pouvoirs ? Sans, surtout leur faire peur, parce que qui a peur ne réfléchit plus…

[Je sais bien qu’il est possible, et tu le sais mieux que moi, de prendre ces pouvoirs à leur propre piège, de les ridiculiser, et donc d’autant mieux médiatiser et populariser un combat, ce que tu as bien réussi en te faisant enlever par hélicoptère après effraction de ton domicile, toutes choses que tu auras néanmoins forcément autant subies qu’éventuellement envisagées. Même si piégeant/ridiculisant ainsi le pouvoir, on ne le rend que plus réactif/agressif aussi]

Ce que je t’écris là s’inscrit dans ce qui se passe en France (mais aussi ailleurs) depuis quelques années, et surtout depuis un peu plus d’un an (en France, depuis le 21 avril 2002). Le sentiment (de plus en plus exprimé) de plus en plus de gens qu’il y a trop de choses qui « ne vont plus ». Et qu’il faut que cela se sache et change. [Même si je sais que ton/notre combat a commencé bien avant].

Mais ce qui a changé, ce qui a changé en moi, dans ma réflexion de citoyen et de militant anonyme, c’est que nous ne pouvons plus nous contenter, à quelques-uns (évidemment les plus « conscientisés » dirons-nous) de mener des combats de dénonciation des « méchants autres » (pouvoirs, institutions, multinationales, etc.). Nous ne pouvons plus nous satisfaire au nom de ce que nous savons (et que les autres ne sauraient pas) d’agir, d’aller de l’avant, de démonter ceci, faucher cela, de braver telles lois, sans d’abord avoir tout fait pour informer et populariser/démocratiser (et donc ouvrir au débat démocratique) nos propositions.

Il me semble qu’un autre recours/efficacité pourrait être l’action/information dans le cadre de la loi républicaine telle qu’elle est (fût-elle souvent républi-vaine).

Nous n’avons sans doute pas exploré toutes les possibilités d’actions légales possibles. Nous devrions pouvoir imaginer, plus que nous ne l’avons fait jusqu’à présent, d’autres actions collectives, symboliques, efficaces, et démocratiques/légales.

Les belles (et historiques) images de manifestants, drapeau au vent, bravant la loi légale (et la prison et, ailleurs ou en d’autres temps, la mort) doivent-elles être notre seul imaginaire de citoyens ou de militants ? Notre combat ne peut-il devenir plus politique, plus intellectuel, plus majoritaire ? Faut-il que nous cédions toujours à cet éternel sentiment d’urgence (ou de « y en a marre ») qui nous fait agir ou nous agiter, convaincus mais minoritaires (même nombreux), sans toujours consulter d’abord autour de nous afin de populariser notre savoir et notre combat et de le promouvoir par d’autres moyens ou symboles que ceux qu’exige l’urgence (et dont raffolent les médias) ?

Entre l’icône (que je vois à la télé, autant fabriquée par la télé que se fabriquant pour la télé) et l’homme (que je sais/sens en prison), je veux imaginer une autre dimension, un autre (futur) humain de José qui demain participera à  (sans les « mener » conformément aux demandes/clichés des uns ou des autres), reprendra les mêmes ou d’autres combats, non pas en notre nom, mais avec nous, avec eux (qui n’en sont pas encore mais pourraient en être), dans le respect d’une légalité qui n’empêche ni la mobilisation ni le « combat » (même si je préfère « débat » ou information).

Il se trouve, José, que ta situation n’est pas définitive (car en d’autres temps ou pays ta fougue médiatisée t’aurait, hélas, été mortelle). Tu survivras à cette condamnation/emprisonnement.

Il y aura un « après » cette cellule où tu es actuellement condamné (en notre nom, même si je ne connais pas tous les vastes contours de ce « notre »). Tu pourrais, mieux que d’autres (vu ton engagement et ton expérience), nuancer/modifier nos manières/habitudes/traditions d’agir, de combattre, etc. Tu pourrais, avec plus de crédibilité que d’autres, dire « Stop, les gars, il y a manière et manière de faire, agir, informer, mobiliser« . Nous avons d’autres possibilités que les images (de personnalités, stars, icônes, etc.) livrées aux télés pour qu’elles en fassent leur gras. Il y a d’autres possibilités d’informer, toucher, mobiliser les gens que les « actions » d’autant plus médiatisables qu’elles sont « personnalisées » ou illégales (au regard de nos lois).

Nous avons, citoyens d’un pays (tant soit peu mais non des moindres) démocratique, d’autre moyens d’agir pour que les choses changent. Nous avons le droit de nous organiser en partis politiques pour proposer d’autres choix que ceux qu’on nous impose, nous avons le droit de participer à des élections, à des campagnes électorales (même si cela nous est moins aisé, financièrement, qu’à certains autres), nous avons le droit de nous unir entre différents partis sur un/des programmes politiques réellement alternatifs et, une fois élus, de les mettre en œuvre conformément à nos engagements clairement définis.

Si nous renonçons à cette perspective, nous nous condamnons à des actions marginales (fussent-elles d’éclat voire momentanément populaires) et non démocratiques (même si nous avions raison de les mener). Nous désespérerions de faire de notre combat une mobilisation majoritaire, parce que, nous diraient certains, nous aspirerions avant tout à exister, briller, être à la pointe, etc. [ce que certains ont bien su te reprocher].

Face à une droite (française et européenne) qui se durcit (car elle sait pouvoir compter sur les divisions de la gauche déchirée entre ses gauches), nous faisons, par nos divisions, courir les plus grands risques non seulement à la démocratie (celle qui s’exprime, faute de mieux, dans des urnes) mais à l’humanité tout entière (puisque nous avons en Europe, historiquement, quelques responsabilités planétaires).

Si nous ne proposons pas des alternatives électorales crédibles (c’est-à-dire de partis affirmant leur ambition à gouverner),  nous nous condamnons (et condamnons autrui) à des actions minoritaires, si médiatisées ou populaires soient-elles, à d’autres emprisonnements, à d’autres cassages de syndicalistes. Après quoi nous pourrons toujours pleurer sur  les injustices subies, manifester, crier, faire du bruit, etc.

Les choses étant ce qu’elles sont, nous ne pouvons plus espérer (ou redouter) quelque révolution menée par quelque parti d’avant-garde (dont nous avons connu les redoutables échecs historiques et les divisions contemporaines). Nous ne pouvons gagner que sur le terrain où nous sommes, celui du peuple, celui du peuple qu’on se prend le temps d’informer, celui de la majorité de nos concitoyens (et non de la foule militante ou « émue », si sympathique ou provisoirement médiatisée soit-elle).

Je ne sais pas très bien, José, où je vais, ni où je/nous pourrions ainsi en venir. Je trouve juste profondément injuste que tu en sois où tu en es (et nous avec toi).

Mais je sais aussi que d’autres, beaucoup d’autres trouvent normal que tu en sois là, puisque tu auras bravé la loi (même si, naguère, d’autres purent dévaster le bureau d’un ministre de l’environnement sans être autrement inquiétés) et été puni conformément à elle. Je pense que, malgré toutes les imperfections de notre légalité républicaine, c’est dans ce champ-là seulement que nous pouvons travailler et mobiliser. Nous n’avons pas, face à nous des fascistes mais seulement des humains mal instruits ou désinformés (ou autrement informés que nous), nous avons donc la possibilité de débattre (plutôt que seulement nous battre) et d’informer avec des mots, des phrases, des actes (légaux), des symboles. Nous ne sommes pas condamnés à l’illégalité (dont on voit parfois les débuts glorieux mais pas toujours les dérives abominables), même si, à juste titre, nous avons parfois le sentiment que la justice n’est pas (aussi) juste (que nous le souhaiterions).

Menant, même légitimement, un combat illégal nous nous condamnerions à être des Antigone (celle qui, un peu à ton image, fut emmurée vivante pour avoir bravé la loi de son oncle Créon, qui estimait lui ne jamais que sauver la cité, comme sans doute bien de nos députés de droite ou concitoyens qui les ont, en désespoir de cause ou par conviction, élus).

Ne devons-nous pas renoncer au romantisme de l’insurrection, qui (le plus souvent) n’arrange jamais que les tyrans (qui savent faire peur au peuple moyennant un peu de foule manipulée ou d’images focalisées) ? Renoncer à José des Causses pour retrouver un José citoyen lambda agissant au sein d’organisations politiques oeuvrant au sein de l’espace démocratique ?

Je sais que cela est difficile, et qu’on peut (parfois) désespérer de pouvoir changer le monde en se mobilisant au sein de partis politiques (je viens de démissionner des Verts dont je désespère). Mais je suis convaincu que c’est la seule alternative (parce que démocratique, même si la démocratie n’est encore, sur bien des points, qu’une utopie… et donc un combat). Cela suppose que nous ne nous permettions plus de dire des autres qu’ils « n’ont rien compris » mais que nous nous obstinions, avec le temps, la patience et la nécessaire fourniture d’information, à leur faire comprendre ce que nous estimerions avoir, nous, mieux compris. Et aussi acceptions de ne peut-être pas avoir (tout à fait) raison ; acceptions que ce que nous estimons vrai peut-être nuancé ou ne devient vrai que si nous parvenons à le partager. [Et qu’est-ce qu’une Vérité que nous n’arriverions pas à faire partager, sinon une opinion, peut-être fausse ?]

Bon, j’arrête avec ce qui pourrait te sembler un galimatias. Et peut-être verras-tu plus clair que moi-même dans ce que je t’écris. J’espère que le plus tôt possible justice te soit rendue.

Mais ma pensée est suffisamment confuse (ou intuitive) pour sentir (au moins mentalement) à tes côtés combien nous sommes tous pris dans un vaste mouvement, à la confluence de tant de vérités et d’erreurs collectives, de manipulations odieuses ou lamentables, de sommes colossales en jeu (OMC, OGM, FMI, etc.), de fossilisations intellectuelles graves (notamment celles qui nous font encore nous appuyer parfois sur tel PIB complètement absurde), etc.

Je pense à ta femme (que j’ai vue aussi à la télé l’autre jour, sans en voir rien d’autre qu’une image, et dont je ne sais rien, sinon qu’elle est actuellement séparée de toi, et toi d’elle, et que ce n’est pas juste).

Je pense à ces députés qui nous déclarent qu’ils vont venir te rendre visite, alors que du temps qu’ils étaient au pouvoir (c’est pas rien quand même !) ils auront peu bougé pour modifier telle loi sur les OGM ou telle plantation OGM, et qu’ils t’auront laissé, toi et quelques autres, la faux ou la masse à la main ( à défaut de faucille et de marteau 🙂 t’aventurer, t’exposer, te sur-exposer, te brûler, et donc te faire conduire à l’ombre.

Ils te diront (non, ils ne te le diront pas !) que tu aurais pu être plus prudent, plus politique/ticien, etc.

Mais tu as été toi. Tu as fait ce que tu croyais devoir faire, en étant ce que tu crois/croyais être, toi.

Maintenant, je suis assis à tes côtés, dans ta cellule du bloc A [bloc ! quel affreux mot et quelle affreuse réalité],  je fume ma cigarette (saloperie de cow-boy américain !), devant le petit tabernacle de l’écran de mon ordinateur, assis, seul aussi, dans ma pièce.

Je pense aux horizons de Maguelone, aux ermites qui s’aventurèrent/s’abritèrent et moururent dans ces marécages. Eux aussi avaient leur foi (dont nous pouvons penser maintenant l’immense mystification).

Je te vois revenu parmi nous, échappé/échappant aux caméras, reprenant le combat avec nous, avec tes proches et surtout tes lointains et néanmoins concitoyens (dont je suis), reprenant ta vie, qui ne se réduit pas à ton/notre combat. Je te revois dans le causse, humant les horizons en même temps que ta pipe. Je te vois sans ta pipe, sans ta moustache, je te sens, te vois, humain parmi les humains, déambulant sur la croûte de notre solitaire planète, si fragile, si belle, si menacée.

Je te salue, José.
Je vous salue, Monsieur Bové.
Je te salue, frère humain.

Après une Étrange Défaite… vers une Résistible Ascension ?

Ci-dessous, le commentaire que j’ai proposé suite à l’article de Michel Wieviorka publié sur le site The Conversation (site français) :

https://theconversation.com/apres-la-reforme-des-retraites-un-horizon-politique-qui-profite-a-lextreme-droite-pour-2022-128913

Le pire est, en effet, à craindre et (sans vouloir me vanter) je peux en témoigner :

Militant de gauche (d’abord aux Verts puis au PS), syndicaliste (FSU), citoyen engagé pendant des années dans un mouvement antiraciste, adhérent au mouvement ATTAC dès le début (jusqu’à ses divisions ultérieures), mobilisé avec la gauche noniste en faveur du Non au TCE en 2005, j’ai appelé en 2002 à voter Chirac au second tour contre Le Pen père, et en 2017 à voter Macron face à Le Pen fille, et je me suis indigné que certains de mes camarades de gauche aient à cette occasion choisi de s’abstenir derrière le slogan « ni patrie ni patron,
ni Le Pen ni Macron ! ».

Mais après un peu plus de deux ans du régime Macron et de réformes qui me semblent toutes plus des régressions sociales que des réformes de justice, après en outre le grand nombre d’incompétences avérées (tant dans le choix des personnes – déconsidérées ou mises en examen peu après leur nomination-  que des mots employés pour humilier des citoyens rencontrés au cours de bains de foule), je finis par me persuader que Macron est bien, ce que je craignais, moins une singularité qu’une entité émergée dans notre vie politique avec l’appui souterrain de puissants courants réactionnaires (banques, lobbys conservateurs, catho ou patronaux, entre soi de happy few d’une upper class) qui n’a d’autre idéologie que la prioritaire réussite des puissants et l’application aveugle d’un ordo-libéralisme plus favorable à l’argent qu’aux gens, et qui à cette fin n’hésite pas à mentir (voir ce qu’il a promis avant-hier sur l’âge pivot de départ à la retraite et comment il y renonce aujourd’hui) ou à promener tout le pays dans quelque « Grand Débat » dont il ne sortira rien, ni synthèse ni consultation populaire, et qu’on passera ainsi à la trappe.

Entre temps, la gauche s’est suicidée à force de tout à l’ego et, atomisée, n’est toujours pas capable de proposer la moindre alternance électorale (sans même parler d’alternative politique).

Et donc, pour ne pas me laisser piéger une fois de plus dans le dilemme condamnant à choisir entre une droite internationale-libérale figée dans son ordo-libéralisme de régression sociale et une droite nationale-sociale en pleine évolution idéologique, j’en suis à me dire que la prochaine fois je ne prendrai pas part à ce jeu de dupes, ce qui, pour la première fois de ma vie, me conduirait, lors d’une élection à enjeu national, à m’abstenir et donc, j’en suis conscient, à entériner la possibilité du pire, un peu comme l’âne qui un jour, rechigné de honte et d’humiliation, préférerait mourir de faim plutôt que de courir tout le temps après la carotte avec laquelle on le fait marcher depuis trop longtemps.